Interview de Jean-Jacques Raillard, DG de Lollipops : "On garde les fondations, mais tout le reste change"
Jean-Jacques Raillard est Directeur Général du réseau d'accessoires Lollipops. Avec Toute la Franchise, il revient sur les nombreux changements d'image et d'identité qui ont eu lieu au sein de l'enseigne ces derniers mois.
Toute la Franchise : Notre dernier échange avec Lollipops date de 2015, que s'est-il passé pour l'enseigne depuis ?
Jean-Jacques Raillard : D'une part, les interlocuteurs ont changé. J'ai repris la direction de Lollipops à la toute fin 2015. Et d'autre part, deuxième grand changement : nous avons profondément réfléchi à la marque, nous avons travaillé ce que l'on appelle la plateforme de marque avec BETC POP. Lollipops est une marque née dans les années 90, elle avait donc besoin d'un nouvel élan et d'un nouveau souffle. A l'aide de l'agence BETC POP, nous avons redéfini la marque et adopté un nouveau logo. Dans ce nouveau logo, on trouve à la fois un côté pop, avec le mot pop qui ressort fortement, les petites oreilles de chat qui sont un petit peu plus affirmées, une certaine féminité dans la rondeur, et puis le mot Paris, puisque nos produits sont dessinés, designés à Paris.
TLF : y'a-t-il d'autres nouveautés dans le concept ?
JJR : Nous avons réfléchi au concept magasin, toujours avec BETC POP, pour une architecture que je qualifierais de plus actuelle, de plus contemporaine, tout en respectant ce qui fait l'histoire de Lollipops comme le côté féminin, girly, mais aussi les couleurs rose, coquelicot, et blanc. Nous avons également voulu un magasin peut-être plus discret dans son mobilier, pour que le concept s'efface derrière le produit. Le concept est fait pour présenter des familles de produits toujours plus nombreuses, un foulard, une montre, un sac à main, une chaussure, une valise, un bijou, un parapluie, des lunettes de soleil…, tous sont des accessoires, mais il faut avoir un magasin modulaire pour les présenter. Par exemple le sac, qui représente environ 60% de notre activité avec la petite maroquinerie, couvre lui-même des instants de vie différents ou des saisons différentes. Il peut être rigide ou très souple, et nous avons donc besoin de modes de présentation un peu différents.
TLF : Quel est l'objectif de ces changements ?
JJR : Ce qui a été l'histoire de Lollipops, girly, couleurs, féminin, fantaisie, petit chat, …, tout ça existe toujours, mais nous l'avons posé aujourd'hui en lui donnant des codes plus contemporains. Notre cœur de cible est une jeune femme, donc nous essayons de répondre le plus précisément possible à ses attentes. Le produit, l'offre, et la largeur d'offre ont été refondus et dans le même temps, nous avons ajusté nos prix pour être plus proches de nos consommatrices. Car nous représentons la fantaisie, or la fantaisie implique le renouvellement : pour être plus juste sur cette offre, nous avons baissé nos prix d'environ 15% sur deux ans. Donc nous avons travaillé le concept, notre identité, les nouvelles campagnes aussi, l'offre et la gamme de prix. On garde les fondations, mais tout le reste change.
TLF : Comment se manifestent les premières évolutions ?
JJR : Notre site marchand Lollipops.fr a pris depuis quelques jours une nouvelle identité (nouveau logo, nouvelle ambiance). Nous avons ouvert quatre magasins avec le nouveau concept, deux en succursale et deux en commission-affiliation, et nous en ouvrons un cinquième au mois de novembre dans le nouveau centre commercial Muse, à Metz. Nouvelle formule, nouveau concept, mais aussi nouveau format, parce qu'historiquement nous étions plutôt sur un format moyen de 35 m² de surface de vente, d'un petit 45 m² GLA. Désormais, nous recommandons entre 50 et 70 m² de surface de vente. Mais nous savons être agiles, si un partenaire vient nous voir avec 40m², bien placés, on fera avec. Mais évidemment, notre histoire est plus riche, plus complète, si vous voulez, en familles de produits, et pour raconter cette histoire-là, il nous faut un peu d'espace. Je crois beaucoup au retail, je crois beaucoup au magasin, mais un magasin aéré, spacieux, offrant de l'aisance : confortable.
TLF : Qu'en est-il de la mise au concept des anciens magasins ?
JJR : Nous déployons notre nouvelle identité, que ce soit sur nos nouveaux magasins, sur notre site, sur la sacherie, tous sont à la nouvelle identité à peu près depuis le mois d'août, mais on peut considérer que nous serons à 100% à partir de l'été prochain, puisque la prochaine collection aura ce nouveau logo. Concernant nos partenaires, nous comprenons qu'un chef d'entreprise ne puisse pas réinvestir immédiatement : nous ferons les choses progressivement. Je ne peux pas demander à un partenaire qui a refait son magasin il y a deux ans ou trois ans d'investir à nouveau, nous verrons donc au cas par cas, en discutant avec chacun d'entre eux. J'utilise la même logique pour nos magasins en propre, pour bien faire, il faudrait que la plupart changent de concept l'année prochaine. Mais nous avons commencé par l'identité visuelle, la communication, les produits, et puis derrière, on déroulera. Il y aura une phase de superposition, de transition, il faut l'accepter. Il s'est passé beaucoup de choses chez Lollipops, nous avons quelque chose de différent à présenter, mais tout en respectant notre ADN et notre histoire. Je ne crois pas aux marques qui, du jour au lendemain prennent tout, jettent tout et disent on va tout refaire. Je prends toujours l'exemple de l'écrivain qui écrit un livre, deux livres, trois livres : il écrit un nouveau tome, il ne réécrit pas toute l'histoire. C'est ça la différence. Notre projet doit s'inscrire dans la durée, comme j'imagine le commerce demain.
TLF : Quels sont vos objectifs de développement ?
JJR : Nous avons une vraie confiance vis-à-vis du modèle de la commission-affiliation : sur le marché français, c'est un modèle qui fonctionne et qui doit fonctionner. Pour notre part, il faudrait arriver à une cinquantaine de boutiques d'ici 2020. Evidemment, cela doit correspondre à une rencontre : nous avons besoin d'un partenaire qui aime la marque, qui la comprend, qui aime la mode, qui aime l'accessoire, et quand ces choses se croisent, si en même temps le candidat est dans une ville avec un bon emplacement, tout ça peut fonctionner.
TLF : Avez-vous des priorités d'implantations en France et à l'international ?
JJR : Nous sommes déjà présents sous un format à peu près similaire en Espagne et en Italie, nous cherchons évidemment à nous développer sur ces marchés existants. Après nous saisissons des opportunités, nous travaillons quelques nouveaux pays actuellement, mais nous avons quand même tendance à nous focaliser sur notre propre marché. Nous avons encore assez peu de magasins, le potentiel est encore important, et puis avec le travail de refonte que l'on vient de faire, il parait dans un premier temps plus raisonnable et réaliste de fixer le business sur le marché hexagonal avant de partir à l'aventure dans le monde. Mais ça reste dans notre viseur, avec par exemple un projet à l'étude au Moyen-Orient. En France, nous recherchons donc des candidats particulièrement à Strasbourg, Lille, Bordeaux…
TLF : Quel profil de candidats recherchez-vous ?
JJR : Nous avons besoin de commerçants, plus que de vendeurs. Parce qu'un commerçant est vendeur, mais au-delà, il a un relationnel dans sa ville. Ce sont ces partenaires-là avec lesquels on réussit… Aujourd'hui, on peut intéresser parce que notre modèle offre des conditions économiques accessibles, nous ne sommes pas dans des investissements démesurés. Mais nous avons tout de même revu nos critères : nous sommes par exemple plus vigilants sur notre environnement. Nous vendons de l'accessoire, il nous faut un lieu avec du trafic, et des enseignes qui nous correspondent dans le voisinage. Ce sont plutôt des enseignes de l'univers féminin, mais pas forcément seulement de la mode : Sephora, L'Occitane, Petit Bateau, il y a un certain nombre de marques qui nous vont très bien, avec des univers fantaisie mais accessibles. Nous avons besoin d'accessibilité et de trafic. Nous sommes capables de nous installer dans des tailles de villes moyennes, environ 50.000 habitants, où tout se passe bien si on a le bon partenaire. Mais plus la ville sera grande, plus on peut imaginer un potentiel. Il faut bien étudier l'environnement concurrentiel, notre propre distribution aussi. Il y a beaucoup de bouleversements aujourd'hui, on parle évidemment du digital, des grands acteurs de la distribution, des Amazon, des Alibaba, on parle des centres-villes à dynamiser, avec par exemple la déclaration récente d'un député sur les mesures à mettre en œuvre pour les relancer. Et nous avons une croyance : Lollipops a de très bonnes performances en centre-ville, mais on peut très bien fonctionner aussi en centre commercial. Il nous faut simplement être dans l'environnement le plus adapté à la marque, où le business se fait. Il y a des villes où tout se fait en centre-ville, et puis d'autres villes où le centre commercial a pris la main. Il faut réfléchir avec notre partenaire sur les conditions locatives, pour ne pas payer n'importe quoi, il faut bâtir ensemble, avec un business model et un business plan. Parce que leur succès, c'est notre succès.