Les hypermarchés fêtent leur 50 ans
Le 15 juin 1963 s'ouvrait à Sainte Geneviève des Bois, sous l’enseigne Carrefour, le premier hypermarché du monde. Symbole par excellence de la consommation de masse, le modèle de l'hypermarché a conquis toute la planète
Le 15 juin 1963 s'ouvrait à Sainte Geneviève des Bois, sous l’enseigne Carrefour, le premier hypermarché du monde. Symbole par excellence de la consommation de masse, le modèle de l'hypermarché a conquis toute la planète.
Cocorico ! Le modèle de l'hypermarché est une invention française. Pourquoi une « invention » ? Tout simplement parce qu'avant l'ouverture du premier hypermarché à Sainte-Geneviève des Bois en juin 1963, aucune surface de vente de ce type n'existait ailleurs ! Qu'elle est la particularité de l'hypermarché à la française ? S'il est certes dérivé du modèle du supermarché à l'américaine, connu depuis les années 30 outre-atlantique, autrement dit un espace de vente en libre service, il s'en distingue sur un point principal : la vente ne se limite pas aux produits alimentaires ! De fait, l'hypermarché fait plus fort que son modèle d'origine en ajoutant aux stricts produits alimentaires des produits de grande consommation venus d'horizons très divers (produits d'entretien, habillement, produits culturels, produits d'hygiène et beauté, électroménager, TV, Hifi.... Pour être appelé hypermarché, la surface de vente doit dépasser les 2 500 m2.
L'hypermarché, un archétype de la consommation de masse
La naissance de l'hypermarché correspond à l'avènement de la consommation de masse. Elle accompagne de fait la mise en route d'une nouvelle forme de commerce marquée par l'industrialisation typique du milieu des années 60. L'envie d'alors est de surmonter les années noires de la guerre. Les produits innovants foisonnent et tout le monde souhaite profiter de ce renouveau à la maison. Les usines tournent à plein régime. Les ménages s'équipent massivement. Et qui dit consommation de masse dit prix. Le modèle de l'hypermarché tombe alors à point nommé. Il développe une politique clairement offensive basée sur de marges restreintes qui joue non plus sur une marge produit confortable mais sur des mini-marges en gros volumes. Cette politique a clairement participé à ouvrir très largement les portes de la société de consommation d'aujourd'hui, et ce au plus grand nombre en raison des prix bas. Et si ce modèle a largement inspiré par la suite les autres formes de commerces dérivés, dont les maxi-discounts, il a largement contribué également au déclin des formules de commerces traditionnels.
Une montée en puissance inexorable
A ses débuts, le modèle de l'hypermarché en a laissé plus d'un sceptique. Mais le succès rencontré par les premières unités a massivement convaincu que là était assurément l'avenir du commerce de l'époque. Et il faut dire que les premiers hypers n'ont rien laissé au hasard. Avec plus 20 000 références en rayon, ils bousculent les codes. Les clients n'hésitent pas à parcourir des dizaines de kilomètres pour faire le plein de produits difficilement trouvables ailleurs, à des prix de 15 à 20 % moins chers qu'ailleurs. Les hypermarchés se mirent alors à pousser comme des champignons un peu partout en France. Le rythme d'ouverture n'ira qu'en s'accélérant jusqu'à atteindre pour la seule année de 1972 le chiffre record de 70 nouvelles unités inaugurées. Cette montée en puissance du nombre d'hypermarchés a rapidement fait naitre des déséquilibres. Là où un hyper s'implantait, le commerce traditionnel s'étiolait. Pour protéger la France du spectre du tout hyper, le Gouvernement de l'époque décide alors de mettre de l'ordre dans la jungle à venir. Dès lors, avec le vote de la fameuse loi Royer en 1973, les nouvelles implantations devraient montrer patte blanche pour obtenir le sésame de l'autorisation préalable. Cette première loi a certes mis un coup d'arrêt au développement anarchique des hypers, mais la marche en avant est repartie de plus belle dans les années suivantes. De 284 hypers ouverts en 1975, l'on passa rapidement à 790 en 1990, et à près de 1 800 en 2013 !
De l'âge d'or... à l'érosion
Si le modèle de l'hypermarché a largement dominé le paysage commercial des années 70, 80 et 90, notamment grâce aux prix bas et à l'arrivée des produits sous marque distributeurs (MDD), à l'orée des années 2000, le rythme d'expansion s'essouffle. Les ouvertures ex-nihilo se raréfient. L'heure est plus à la rénovation des structures les plus anciennes et à la transformation des supermarchés en hypermarchés par le jeu des extensions. Ce retour à la raison est dictée par le maillage surabondant du territoire, mais aussi par la lente érosion des parts de marché. Et en effet, à partir de 1999, les hypers perdent du terrain. Jusqu’alors les parts de marché allaient crescendo suivant le rythme de la montée en puissance des équipements. Représentant 4 % du commerce de détails en 1970, les hypermarchés grignotent chaque année sur la concurrence pour passer à 9 % en 1980, 17 % en 1990, et même 20 % en 1999. Puis, sous les coups de butoirs des maxi-discounters entre autres, les hypermarchés ont entamé une lente descente. Selon les chiffres de l'INSEE, en 2011 déjà, la part de marché des hypermarchés n'était plus que de 18,2 %. Ceci étant, avec 52,3 % de parts de marché en 2013 sur l'univers des produits de grande consommation (PGC) et près de 1 940 magasins ouverts en 2013, l'hypermarché reste de loin le format de distribution dominant en France.
Tout le dossier
- L'hypermarché est mort, vive l'hypermarché !
- Des consommateurs désenchantés de l'hypermarché
- Chronique d'un déclin annoncé ?
- L'hypermarché toujours plébiscité par les Français
- Quel hypermarché demain ?
Dominique André-Chaigneau, Toute La Franchise ©