Jean-Bernard Valade, président de Vegalis, est un acteur historique du rachat de crédits en France. Il a évoqué avec nous ce marché particulier mais également, en tant que président de l’AFIB et membre du CCSF, les nouvelles réglementations encadrant le métier d’intermédiaire en opérations de banque (IOB).
Toute la franchise : Jean-Bernard Valade, quelle est l’activité de Vegalis, votre société ?
Jean-Bernard Valade : Vegalis est une société de courtage créée il y une quinzaine d’années, en 1996. Elle est spécialisée dans le rachat de crédits, avec une spécificité : nous avons toujours travaillé en prescription bancaire, c’est-à-dire que 100% de nos clients nous sont envoyés par les agences bancaires. Nous n’avons jamais fait de publicité à la télévision.
T.L.F : Pourquoi, et à quel moment, les banques orientent-elles leurs clients vers vous ?
J.V. : Elles s’adressent à nous lorsqu’elles constatent qu’un de leurs clients, en situation de malendettement, commence à dériver, avec des rejets de prélèvements ou des commissions négatives qui s’accumulent. Nous allons alors lui proposer un nouveau crédit, qui va lui permettre de restructurer les autres.
Soyons clair : il ne va pas se désendetter. Au contraire. Ce nouveau crédit va lui coûter des frais, des honoraires, éventuellement des pénalités. Il va donc être plus endetté avant qu’après, en montant global. En revanche, le fait de pouvoir allonger la durée de remboursement, à un taux très certainement moindre qu'un crédit renouvelable, va diminuer le montant de ses mensualités, et augmenter celui de son reste à vivre. C’est le fondement du rachat de crédit
T.L.F : Comment le marché du rachat de crédit a-t-il évolué ces dernières années ?
J.V. : Il s’est surtout développé à partir de 2001-2002. Avant, c’était un produit inconnu. A partir de 2003, plusieurs établissements spécialisés ont élargi leur activité au financement des rachats de crédits (1). Puis tout s’est arrêté en 2008, après la chute de Lehman Brothers. Les clients ne manquaient pas, mais les robinets de financement ont été coupés. Nous étions dans la situation du boulanger qui a une file de clients à attendre, mais pas de pain à leur proposer.
Certains confrères ont dû mettre la clé sous la porte. Cette fois, malgré le retour de la crise, je pense que nous serons moins touchés. Le marché est plus mûr, même s’il est toujours convalescent.
T.L.F : En tant que président de l’AFIB (2) et membre du CCSF, vous militez pour un meilleur encadrement de la profession d’intermédiaire en opérations bancaires (IOB). Pourquoi cet impératif ?
J.V. : Il s’agit d’un métier émergent, qui manque encore de professionnalisme. Grâce à la loi de régulation bancaire et financière d’octobre 2010 (3), on sait désormais plus clairement qui est IOB, et qui ne l’est pas. Les nouvelles normes sont très strictes, en termes de formation notamment.
C’est une très bonne chose, car le consommateur saura qu’il a affaire à un professionnel, capable de l’alerter sur les dangers de tel ou tel produit. Et cette confiance est la condition du décollage du courtage en France. Car même s’il a dépassé les 20% du marché des crédits en 2010, nous sommes encore loin des 60% des pays anglo-saxons.
T.L.F : La loi de juillet 2010 sur le crédit à la consommation (dite Loi Lagarde) a également réformé la distribution des rachats de crédits. En quoi ?
J.V. Nous attendons encore la publication du décret, mais elle va délimiter ce que les banques ont le droit de faire ou pas. A chaque fois qu’une banque fera un prêt, elle devra s’assurer que ce n’est pas pour financer un rachat de crédits. Si c’est le cas, elle aura de nouvelles obligations en matière d’information de son client, avec notamment des tableaux comparatifs du type « avant/après ».
Cette réforme est de nature à éviter de nombreux litiges. C’est aussi une bonne nouvelle pour un « artisan » comme moi, mieux placé pour fournir ces informations qu’un acteur industriel.
(1) Les principales banques prêteuses sont CFCAL (filiale de Crédit Mutuel Arkea), Royal Saint-Georges (GE Money Bank), Sygma (BNP Paribas et Galeries Lafayette), CGI (Société Générale), Crédit Lift (Crédit Agricole SA), BNP Paribas Consumer Finance, Creatis (Crédit Mutuel-CIC) et BPI (Crédit Immobilier de France)
(2) Association française des intermédiaires bancaires, syndicat professionnel regroupant des courtiers en crédit immobilier, en rachat de crédits et en prêts aux entreprise.
(3) Le nouveau cadre légal des IOB est suspendu à la parution de décrets, prévue pour le 31 décembre 2011 pour une application en 2013.
Source : cBanque.com - L'info pour vos finances