"Les consommateurs ont pris conscience du fait que l’alimentation avait un impact sur la santé" (Jean-François Eon, Dubble)
Jean-François EON, Président-Cofondateur de Dubble Food Développement, établit le bilan de l'année 2021 pour son enseigne de restauration rapide healthy, et dresse l'inventaire détaillé des perspectives du groupe pour les mois à venir.
DUBBLE
Quel bilan tirez-vous de cette année 2021 (Au niveau commercial et du développement) ?
Dans le contexte très particulier de cette année 2021, nous avons la satisfaction d'avoir réussi à ouvrir six nouveaux DUBBLE : quatre en franchise à Nancy, Reims, Bordeaux et Lyon, et deux en propre à Lille et Paris la Défense.
Même si notre rythme de développement s'est un peu ralenti par rapport aux années 2017, 2018 et 2019, notre bilan 2021 reste largement positif, témoignant de la bonne santé de la restauration rapide en général et de la pertinence du positionnement "healthy" de DUBBLE en particulier.
Comment votre réseau s'est-il adapté à la crise covid ? Avez-vous observé une évolution de votre clientèle et des habitudes de consommation ?
Le secteur de la restauration a été, dans son ensemble, particulièrement affecté par les conséquences de la crise sanitaire. Cependant, tous les experts s'accordent à dire que la restauration rapide a mieux résisté que la restauration à table notamment.
C'est effectivement le cas du réseau DUBBLE, qui réalise une très bonne année 2021 et voit son chiffre d'affaires progresser de 33 % par rapport à 2019. Ainsi, nous franchissons en 2021 le cap symbolique des 10 millions d'euros de chiffre d'affaires HT.
La vente à emporter, qui était déjà largement pratiquée avant la crise, est devenue une nécessité au moment où les salles à manger n'étaient plus accessibles. Cette habitude est restée et la vente à emporter est toujours très majoritaire dans nos restaurants.
De même, toutes les études le confirment, de plus en plus de français ont recours à la livraison, qui représente parfois d'ailleurs une part significative du chiffre d'affaires de certains de nos restaurants.
Nous n'avons pas fait preuve d'une grande originalité en la matière mais nous n'avons pas voulu rester à l'écart de cette tendance et avons incité et aidé nos franchisés à développer ce service par le biais des agrégateurs.
Par ailleurs, même s'il ne s'agit pas à proprement parler d'un changement d'habitude de consommation, nous devons désormais tenir compte des impacts du télétravail qui, dans certains cas, affecte la fréquentation de nos restaurants.
Un dernier point très positif pour notre positionnement. Depuis quelques années nous remarquons un changement sociétal : les consommateurs ont pris conscience du fait que l’alimentation avait un impact sur la santé. La crise sanitaire a eu un impact psychologique important et a renforcé cette idée et nos clients sont de plus en plus convaincus qu’une alimentation saine les aide à combattre les maladies. Et c’est ce qu’ils trouvent chez Dubble.
Aviez-vous développé de nouveaux outils et/ou nouvelles pratiques qui ont été pérennisés ?
Nous avons mis à profit la période du premier confinement pour développer notre propre application de click & collect qui a pu être déployée dans tous nos restaurants dès la reprise de l'activité.
Cette nouvelle pratique, même si elle ne concerne encore qu'une minorité d'entre eux, est désormais ancrée dans les habitudes de consommation de nos clients.
Dans un tout autre domaine, nous avons largement fait appel à la visioconférence pour conserver le lien et communiquer avec nos franchisés, en particulier pendant les périodes de confinement.
Cet outil qui, certes, ne remplace pas le contact direct, est maintenant couramment utilisé par nos animatrices réseau qui organisent chaque mois une visio avec leurs franchisés.
Comment envisagez-vous l'année 2022 ? Avez-vous de nouveaux projets ? Des attentes ?
Sur le plan du développement du réseau DUBBLE, l'année 2022 se présente bien puisque nous allons ouvrir cinq nouveaux restaurants dans le courant du premier semestre (Strasbourg, Caen, Montpellier, Bordeaux et Dijon) et que les contrats de réservation de zones déjà signés devraient déboucher sur au moins six autres ouvertures au cours du second semestre.
Nous reviendrons au salon Franchise Expo Paris en mars 2022 (il avait été annulé en 2020 et nous n'y avions pas participé en 2021) ce qui, comme à chaque fois que nous y avons été présents, devrait se traduire par la concrétisation de plusieurs nouveaux contrats.
Donc, nous franchirons en 2022 le seuil, tout aussi symbolique, des 50 restaurants.
Même si nous sommes ouverts et partie prenante de la digitalisation de notre activité, nous avons toujours considéré chez DUBBLE que l'offre produit (la carte, les recettes) constituait le "cœur du réacteur". Ce qui nous permettrait de nous différencier de la concurrence. Aussi, chaque nouvelle carte (nous en changeons quatre fois par an) nous fournit l'occasion d'introduire des recettes innovantes. Toujours dans le respect des valeurs de DUBBLE : des recettes préparées sur place, exclusivement avec des produits frais.
Pensez-vous que l'élection présidentielle pourrait avoir une influence (positive ou négative) sur votre business ? Qu'en attendez-vous ?
Je suis tenté de répondre que tout dépendra de la ou du candidat(e) élu(e) et du programme qu'elle ou il se sera engagé à appliquer… Cela étant, je suis plutôt optimiste quant à la façon dont les entreprises seront accompagnées et à la manière dont la création d'entreprise sera encouragée.
Un dernier mot, une note positive pour conclure ?
J'aime beaucoup cette histoire * :
"Yang est un clochard de Pékin. On le trouve généralement à la sortie du métro de la rue Gulou, dans un quartier touristique, où pendant des années il a survécu grâce aux aumônes des travailleurs du quartier. Mais sa vie a changé du tout au tout en 2015 quand les Pékinois cessent soudainement d'avoir de la monnaie sur eux. Du jour au lendemain, l'ensemble de la population chinoise télécharge des applications comme WeChat Pay ou Alipay et intègre les paiements mobiles à son quotidien.
Pour le vieux Yang, cette technologie disruptive aurait pu être catastrophique : sa survie dépendait des piécettes et billets nichés dans les porte-monnaie des passants. Mais, face à cette crise, il s'adapte. Il commence par rassembler suffisamment d'argent pour s'acheter un smartphone Xiaomi à bas coût. Il imprime ensuite une pancarte portant les QR codes de ses comptes WeChat Pay et Alipay. Il revient enfin à son emplacement et, pancarte autour du cou, connecte son téléphone au wifi du métro et patiente.
Le vieux Yang n'a pas seulement survécu à ce monde sans cash : il a prospéré. Aujourd'hui ceux qui veulent lui donner de l'argent ne plongent plus la main dans la poche en quête de menue monnaie. Ils ouvrent leur appli de paiement sur leur téléphone, scannent le code de sa pancarte et lui transfèrent quelques yuans. Il reçoit en moyenne trois à cinq yuans par don, contre un à deux auparavant - une hausse de presque 300 %. Le progrès numérique, ça fonctionne !"
J'aime cette histoire, car elle illustre la nécessité et l'utilité de s'adapter aux changements. Cette crise sanitaire qui n'en finit pas nous en procure l'opportunité en nous obligeant à réfléchir à l'évolution de nos modèles d'affaires.
* Harvard Business Review France N° 46