Politique tarifaire : de quelle liberté dispose vraiment le franchisé ?
Chaque entreprise doit rester maitresse des prix qu’elle propose.
Le fonctionnement de la franchise permet à un franchiseur de se développer avec un réseau de plusieurs indépendants (les franchisés) à qui il assure une assistance, et transmet un savoir-faire ainsi que des outils commerciaux. Et en matière de prix ? Le principe d’homogénéité au sein du réseau est incohérent avec la liberté apportée par le droit en matière de fixation de prix. Chaque entreprise doit rester maitresse des prix qu’elle propose. Chaque franchisé peut-il mettre sur l’étiquette le prix qu’il souhaite ? Oui, mais pas totalement. Explications.
Avoir des prix fixes en franchise, c’est utile
Alors, libres ou non de fixer leurs prix les franchisés ? Pour connaître la réponse, il faut se pencher sur des questions de droit et de formalisme. Les franchisés possèdent des entreprises indépendantes. Ce sont des entrepreneurs, qui, bien que liées à un franchiseur par un contrat de franchise, n’en restent pas moins totalement indépendants sur le plan administratif et fiscal. Aux yeux du droit de la concurrence, il s’agit donc d’entreprises distinctes qui doivent librement fixer leurs prix, sous peine de se voir accusées d’entente illicite. Le Code du Commerce sanctionne les ententes dites verticales au sein de réseaux, qui limitent la concurrence par le prix. « Est puni d'une amende de 15 000 euros le fait par toute personne d'imposer, directement ou indirectement, un caractère minimal au prix de revente d'un produit ou d'un bien, au prix d'une prestation de service ou à une marge commerciale », selon l’article L.442-5 du Code du commercei.
Plusieurs réseaux de franchise ont ainsi été condamnés dans le courant des années 80 et 90 pour s’être livrés à ce genre de pratiques. Les ententes étaient particulièrement surveillées. Absurde dans le cadre de la franchise ? Oui, si l’on considère que le fait de proposer des prix coordonnés au sein d’un réseau est un gage de meilleure communication et de meilleure lisibilité de l’offre globale. Comment réagissent des clients en observant des écarts de prix entre plusieurs points de vente de la même enseigne ? Et le positionnement marketing et la perception des clients sont troublés si aucune cohérence n’est permise par les prix. Le droit a ainsi évolué, notamment via le règlement communautaire 2790/99, complété depuis par un nouveau Règlement d’Exemption n°330-2010, entré en vigueur en juin 2010ii. Celui-ci ne supprime pas l’interdiction d’entente sur les prix, mais assoupli les conditions qui permettent de transmettre un prix conseillé, voire un prix maximum. Le franchiseur peut recommander un prix de vente, « à condition que ces derniers n'équivaillent pas à un prix de vente fixe ou minimal sous l'effet de pressions exercées ou d'incitations par l'une des parties ».
La liberté de fixation des prix est relative pour les franchisés
La liberté de fixer les prix est semblable à de nombreuses autres actions : elle est encadrée par le contrat de franchise. Théoriquement, le franchisé est libre de mener la politique de prix qu’il souhaite. Pas de prix de revente imposés. La politique tarifaire reste à sa libre appréciation. Après tout, il est commerçant et indépendant.
- Aucun franchiseur de peut imposer de prix minimum ;
- Le montant de remises ou de soldes ne peut pas être imposé.
Mais dans les faits, cette règle est bien souvent contournée. Car les prix indicatifs, les prix conseillés ou les prix maximum sont eux totalement légaux. Disposer d’une indication (pas une obligation) de prix à pratiquer est d’ailleurs une bonne chose, et donne un repère aux franchisés.
- Pratiquer des prix bas alors que l’enseigne possède un positionnement haut de gamme viendrait fragiliser le positionnement de l’enseigne ;
- Proposer des opérations promotionnelles à répétition, sans action coordonnée avec la tête du réseau, risque de rendre illisible la marque et sa stratégie.
De quelles marges de manœuvre dispose alors vraiment un franchisé ? Tout dépend des réseaux. Si les achats sont centralisés, et les prix proposés par les fournisseurs équivalents entre les franchisés, ils vont logiquement faire face aux mêmes contraintes et aux mêmes questions pour fixer leurs prix. Ils ne disposent pas d’un pouvoir de négociation fort, et sont donc contraints, par leurs prix d’achats, à fixer des prix de vente cohérents. Toutefois, selon leur stratégie, mais aussi leurs performances, les franchisés peuvent ajuster les prix. Quel pourcentage ? 3% ? 5% ? Rarement au-dessus de 10%.
Sans être réellement contraints directement et par écrit par leur franchiseur, les franchisés d’un même réseau présentent en règle générale des prix identiques ou très proches. Le fonctionnement même en réseau de la franchise explique cette « stabilité » relative des prix pratiqués, nécessaire pour maintenir une unité, et permettre à chaque membre de dégager de la marge.