Ouvrir un sex shop en franchise : comment réussir sur ce marché sexy ?
Un secteur marchand qui se démocratise
Il n’a jamais été si peu tabou de parler sex toys ou objets érotiques que ces dernières années. Le marché du sexe semble en plein essor et donc très attractif pour créer son entreprise. Mais est-il réellement aussi simple d’ouvrir un sex shop en franchise que pour n’importe quelle autre activité ?
Des marques coquines sont devenues célèbres
Apparus en France dans les années 70, les sex shops ont été l’un des symboles de la libération sexuelle. Ils ont longtemps eu une réputation sulfureuse, avec une clientèle presque exclusivement masculine, la législation leur imposant de camoufler leurs vitrines. Mais depuis quelques années, on peut observer de nombreux changements dans ce secteur, qui attire désormais de plus en plus de femmes et de couples.
Jacquie et Michel
La marque Jacquie et Michel, célèbre pour ses vidéos pornographiques amateurs, a lancé son réseau de boutiques en 2015. L'enseigne a ainsi successivement ouvert des sex shops à Paris, Lyon, Nancy, Annecy ou encore Saint-Etienne et Mulhouse. Le développement du réseau a pris de l'ampleur en 2019, avec sa première ouverture dans les Dom-Tom : une boutique érotique Jacquie et Michel a ouvert ses portes à La Réunion en 2019.
Dorcel Store
En juillet 2023, Dorcel Store a ouvert son 17e magasin dans la zone commerciale de Biard, près de Poitiers. Seize ans après l'ouverture de sa première boutique en Bretagne, le groupe Marc Dorcel poursuit ainsi sereinement le développement de son réseau de points de vente physiques. Des points de vente qui sont « de belles boutiques design fun et classe posent des sextoys, huiles de massage, lingerie sexy, textile, accessoirex et DVD X, soit environ 1800 références contre 3000 pour la boutique en ligne », précisait ainsi Grégory Dorcel, directeur général du groupe, dans un article LSA.
Concorde, Passage du Désir et Désir & Moi
À Paris, les enseignes Concorde et Passage du Désir proposent de véritables supermarchés érotiques ayant pignon sur rue. En Belgique, des concepts comme Désir & Moi se développent sur le créneau de la Love-Boutique. Et c'est d'ailleurs sur ce créneau que souhaitent se développer les enseignes érotiques. « Nous préférons l'appellation de Love Shop, explique ainsi Céline Bodin, la responsable du tout nouveau Dorcel Store de Poitiers, dans les colonnes de La Nouvelle République. L'idée est de faire quelque chose de chic et haut de gamme. »
Alors finie l’image glauque et confinée des boutiques à l’ancienne ? Les sex shops peuvent-ils être désormais considérés comme des commerces comme les autres ?
Marché du sexe : un secteur démocratisé et grandissant
Le terme « sex shop » lui-même tend effectivement à disparaître au profit d’un nouveau : les « love shops », à l’image plus douce, plus adaptée à une nouvelle clientèle féminine en plein essor. Parallèlement à ce changement de comportement, on peut noter l'évolution de l’utilisation de sex toys et d’accessoires sexy popularisés récemment par des romances érotiques notamment « 50 Nuances de Grey ». Selon une récente étude, un Français sur deux a déjà utilisé un sex toy et cela devrait continuer à se généraliser. Le cabinet d’études de marché Grand View Researc estimait, dans un rapport paru en 2021, que le marché des sex-toys, qui atteignait déjà 32,7 miliards de dollars, allait croître en moyenne de 8,5% par an de 2023 à 2030.
Pas de pornographie, mais de l’érotisme, dans ces nouvelles boutiques à l’éclairage et la mise en scène savamment travaillés. On peut y venir en couple, elles axent davantage leur image sur le bien-être et l’esthétisme que sur une réelle pornographie, rejetant l'aura selon elles vulgaire, violente et misogyne des sex shops. Elles tendent à se donner une image chic et lissée, souhaitant s’adresser au plus grand nombre. Leur gamme s’étend des sex toys à la lingerie fine, qui est souvent le motif de visite principal de la venue de couples dans ces lieux de vente.
Leurs commerçants tiennent à se différencier très nettement des sex shops, souhaitant que leur point de vente soit finalement plutôt assimilé à des boutiques de lingerie comme les franchises Darjeeling ou Valege par exemple, simplement davantage spécialisées dans des gammes plus sexy. By loving associe même l'ambiance de son love shop à celle d'une parfumerie de luxe.
D'autres enseignes ont fait le pari de se focaliser spécifiquement sur l'épanouissement féminin. C'est notamment le cas de la franchise Body House, qui propose de la lingerie, des cosmétiques et des jouets intimes dans des environnements valorisant la féminité.
Des gammes de plus en plus variées et complètes
Pour ce qui est des grandes marques ayant une image plus axée sur la pornographie, comme par exemple Jacquie et Michel, elles ont su populariser leur image grâce à des produits dérivés ludiques, pouvant aller du tee-shirt à la marque de bière.L'idée est réellement de décomplexer l'achat et d'axer l'ambiance des boutiques sur le bien-être et la bonne santé sexuelle. Patrick Pruvot, fondateur du réseau de magasins Passage du Désir, qualifie ainsi dans un article paru sur le site Les Numériques, son enseignes de « boutique de cadeaux pour les grands ».
Les love shops brouillent également les pistes, ramenant le commerce d'objets érotiques vers la lumière tout en utilisant les icônes du secteur pornographique grand public, comme par exemple, la présence pour l'ouverture d'un love shop By loving à Aix-en-Provence de Clara Morgane, l'une des plus célèbres stars du X en France.
Des freins au développement toujours présents
Tous les tabous autour de cette activité sont-ils pour autant réellement levés ? Pas vraiment. La plupart des entrepreneurs en témoignent, monter sa boutique sur le marché du plaisir s'est avéré être un véritable parcours du combattant. Dans la pratique, trouver un local et les fonds nécessaire à l’installation d’un sex shop ou d’un love shop reste très difficile, la plupart des banques ne souhaitant pas associer leur image de marque à ce genre d’activités. De plus, la plupart des locaux commerciaux excluent d’emblée lors de leur mise en vente ce type d’utilisation. Le plus simple reste alors bien souvent de faire appel au financement participatif pour ouvrir son sex-shop.
Ouvrir une boutique coquine est une activité réglementée nécessitant depuis 2007 une distance minimum de 200 mètres avec un établissement scolaire ou accueillant des mineurs, contre les 100 mètres précédemment imposés par la loi de 1987. Selon Baptiste Coulmont, co-auteur de « Sex shops, une histoire française », cela rend en pratique quasiment impossible l’ouverture d’un nouveau sex shop à Paris. Et la nouvelle réputation que tend à se forger la profession en s’affirmant plutôt « love shop » que « sex shop » ne met pas à l’abri de cette législation.
En 2012 à Paris, l’enseigne 1969, curiosités désirables en a fait les frais. Située à moins de 100 mètres d’une école primaire, l’échoppe a dû fermer suite aux plaintes de deux associations catholiques, ouvrant un débat quant au caractère d’objet pornographique que pouvait constituer la vente de sex toys. En effet, malgré une médiatisation de plus en plus libérée sur le sujet de l’érotisme et la démocratisation des sex toys, les lois sont de plus en plus restrictives sur le sujet. La loi de 1987 s'adressait uniquement à la littérature ou aux vidéos pornographiques, texte qui a été modifié pour s’étendre désormais aux objets, s’adaptant au nouvel essor de la vente de sex toys. Le but était de montrer qu’il falait différencier les termes sex shops et love shops.
Ouvrir un Love shop en franchise
Un rapide tour des boutiques présentes sur le web montre que les enseignes existantes sont en demande d’expansion. Toutes ou presque comportent une rubrique incitant à rejoindre leur réseau, certaines n’hésitant pas à détailler les démarches nécessaires pour ouvrir son sex shop en franchise. Et dans les revues de presse concernant l’ouverture de nouvelles enseignes, peu n’avouent pas rapidement leur désir de s’étendre le plus vite possible par le biais d’une franchise. Cela semble montrer malgré tout le dynamisme de ce secteur en pleine mutation.
Pour un entrepreneur ayant pour projet d’ouvrir un sex shop, passer par une franchise permettrait donc peut-être de bénéficier de l’appui du réseau du franchiseur ainsi que de son expérience pour passer au travers des difficultés et écueils que l’on peut rencontrer à toutes les étapes de la création d’une boutique vendant des objets érotiques. Il serait donc ainsi moins risqué de lancer sa boutique par le biais d’une franchise que seul.
Reste à lever les difficultés concernant le financement d'un fonds de commerce, qui sont néanmoins toujours présentes pour adhérer à une franchise. Malgré une image plus respectable et une apparence d'accessibilité, les sex shops ne sont pas encore tout à fait un commerce considéré comme les autres.