Focus sur : le Programme Action Cœur de Ville
Ou comment Etat, collectivités et acteurs économiques collaborent pour redynamiser les centre-ville
Lancé en décembre 2017 et entré dans sa phase opérationnelle fin 2019, le Programme Action Cœur de Ville a vocation à accompagner les collectivités dans leurs opérations de revitalisation des territoires (ORT). A cet effet, non seulement des crédits sont débloqués (5 milliards d’euros sur 5 ans) mais aussi des actions de concertations, de formations et d’échanges de bonnes pratiques sont mises en place. A terme, l’objectif est d’attirer de nouveau habitants et enseignes dans les centre-ville pour redynamiser ces villes moyennes en décroissance depuis au moins une décennie. Focus sur le Programme Action Cœur de Ville.
Pourquoi un Programme Action Cœur de Ville ?
Essor du commerce en ligne, développement extrêmement rapide des zones commerciales de périphérie, paupérisation des centre-ville avec une fuite des CSP intermédiaires vers les communes de périphéries, regroupements en communautés de communes et agglomérations, etc. En quelques années, alors que 25% de la population vit dans une ville moyenne, ces dernières se sont vidées de leurs forces vives, habitants et, dans leur sillage, commerces, qui se sont tous concentrés dans les périphéries et les plus petites communes.
Conséquence immédiate de ces flux migratoires, le taux de vacance commerciale dans les centres, notamment de villes moyennes, est passé de 7,2% en 2012 à près de 12% en 2018. De fait, seuls 30% des villes connaissent un taux de vacance commerciale inférieur à 10% alors qu’elles étaient 50% en 2012 !
Et pourtant, il aura fallu près de 20 ans aux collectivités et aux pouvoirs publics pour prendre pleinement la conscience de cette décroissance urbaine, également désignée sous le terme anglosaxon de « shrinking cities ». Il aura fallu attendre le rapport d’un groupe de recherche composé notamment de sociologues, fin 2017, pour apporter des données quantitatives et qualitatives concrètes sur ce phénomène.
C’est pour faire face à ce déclin initié depuis le début des années 2000 et accéléré depuis 2010 que le Ministère de la cohésion des territoires a lancé en décembre 2017 le Programme Action Cœur de Ville. La première phase du programme a consisté en un concours, les collectivités étant amenées à présenter leurs candidatures pour participer au programme. Une fois les 222 villes bénéficiaires sélectionnées, le programme de revitalisation des centre-ville a été doté de 5 milliards d’euros sur 5 ans et une première phase de réflexion a été mise en place, notamment pour permettre la concertation des acteurs. L’objectif est de soutenir « Habitat, commerce, création d’emplois, transports et mobilité, offre éducative, culturelle et sportive, qualité des sites d’enseignement, développement des usages des outils numériques » (source).
Quelles solutions pour la revitalisation des centre-ville ?
Créer de halles gourmandes, attirer des professionnels de santé, transformer l’habitat (notamment pour le faire monter en gamme), intégrer des programmes d’agriculture urbaine, attirer des locomotives commerciales, créer des postes de managers de centre-ville (sortes de conseillers spécialisés en marketing, merchandising et commerce employés par le ville ou des associations de commerçants pour soutenir les points de vente urbains), organiser la gratuité totale ou partielle du stationnement pour les clients des commerces, etc. : voilà des exemples de propositions qui sont faites aujourd’hui, notamment, par les villes lauréates du Programme Action de Cœur de Ville. Il s’agit en réalité d’actions portant sur tous les aspects de la vie en ville, qui doivent être abordés afin, en définitive, de redonner des raisons de venir en centre-ville !
C’est pour cette raison que le Programme Action Cœur de Ville prévoit des sommes importantes uniquement pour le volet ingénierie de ces projets de revitalisation des centre-ville. Car, alors qu’aucun modèle absolu ne peut être développé, il est indispensable de concevoir au cas par cas des projets qui soient en accord non seulement avec la population locale mais aussi avec les projets politiques et le tissu commercial et économique. C’est pour cette raison que les commerçants, par le biais de représentants, sont également invités à participer aux réflexions des chargés de missions et des élus !
Quels enseignements pour les enseignes de franchises ?
Les enseignes de franchises de restauration, de prêt-à-porter, de déco et d’ameublement, de literie ou autres commerces spécialisés qui souhaitent conserver des points de vente dans les centre-ville doivent impérativement tenir compte des spécificités de ces zones en déclin pour garantir la pérennité de ces points de vente. Des actions peuvent par exemple être mises en place pour attirer les consommateurs et faciliter leurs achats en centre-ville (prise en charge du parking, retrait des commandes en ligne, livraison à domicile des commandes faites en magasin, etc.). Les locaux doivent en outre être sélectionnés avec le plus grand soin, en analysant les évolutions des flux de circulation automobiles et piétons.
Par ailleurs, elles doivent participer activement, au côté des collectivités et de l’Etat, à la définition des politiques de redynamisation des territoires si elles ne veulent pas que les mesures soient prises sans elles. Elles disposent d’une expertise précieuse pour l’élaboration de politiques d’aménagement du territoire qui tiennent compte de toutes les parties prenantes, c’est-à-dire y compris les acteurs économiques, oubliés pendant longtemps des urbanistes !
Aujourd’hui plus que jamais, alors que l’Etat et les collectivités s’investissent dans deux vastes programmes d’urbanisme (Repenser la périphérie commerciale et Action Cœur de Ville), les enseignes ont un rôle à jouer dans la définition de la ville de demain, pour une ville plus accessible, plus responsable et plus conforme aux besoins de toutes les parties prenantes des territoires !