Protéger son enseigne de franchise à l'ère du numérique

Le digital accentue les risques de contrefaçon et de concurrence déloyale

Le numérique multiplie les atteintes possibles

« Le développement des usages numériques change la donne en matière de propriété intellectuelle puisqu'il multiplie les atteintes possibles. » Si les actes de contrefaçon ont toujours existé, ils prennent une toute autre dimension à l’ère du digital. Par sa nature dématérialisée et globale, le numérique a élargi le champ d'action des contrefacteurs qui, aujourd’hui, peuvent facilement toucher une audience mondiale, et ce, depuis n’importe quel pays. 

Cette ubiquité augmente considérablement les risques pour les franchises. « Vous pouvez vous retrouver victime d'actes de contrefaçon ou de concurrence déloyale par des acteurs qui seront loin, mais qui auront une très forte présence numérique. » En conséquence, les réseaux doivent non seulement surveiller leur marché local, mais aussi l'ensemble du marché mondial. 

Vanessa Bouchara précise que ces atteintes peuvent concerner l'enseigne, dans sa globalité, ou uniquement certains produits et services proposés. Copie de produits, reproduction de logos et slogans, et même la duplication complète de sites web : ces actes peuvent non seulement entraîner des pertes financières, mais aussi nuire à la réputation de la franchise. 

La nécessité d’une surveillance et d’une réaction rapide

L’avocate met en garde contre la négligence des franchises face à ces risques. Il est en effet crucial que les franchises prennent des mesures proactives pour protéger leur propriété intellectuelle dans ce far west numérique. Vanessa Bouchara insiste sur l'importance d'une vigilance constante : « Il faut être très vigilant et avoir des actions fortes de surveillance sur les différents réseaux sociaux et sites internet pour agir très vite et faire bloquer ces atteintes. »

Elle souligne que des mesures peuvent être prises pour bloquer ces atteintes, notamment en faisant fermer des sites web contrefaits. « Lorsqu'on a des sites internet […] qui reprennent complètement votre activité, votre wording, vos mots-clés, votre présentation, on peut les faire fermer et on peut engager des actions correctrices nécessaires […] »

Pour assurer une surveillance efficace, il est possible d’utiliser des technologies avancées. Les logiciels de recherche d'images inversées et les systèmes de suivi des mots-clés, par exemple, peuvent aider à détecter rapidement les infractions. Cependant, la technologie seule ne suffit pas. Il est également essentiel de former le personnel à reconnaître les signes de contrefaçon et à réagir de manière appropriée. L’idéal, pour protéger efficacement les actifs numériques de sa franchise, restant de s’appuyer sur des experts en propriété intellectuelle. 

Intelligence Artificielle et franchise : apprivoiser plutôt que subir

L'IA est amenée à se développer de plus en plus

Interrogée sur l’émergence de l’intelligence artificielle et de son potentiel impact sur les réseaux de franchise, Vanessa Bouchara conseille fortement d’intégrer ces nouveaux outils. Elle assure que l'IA est amenée à se développer de plus en plus et qu’il convient de l’intégrer dans ses processus pour ne pas en subir les effets négatifs. « Plus ce sera structuré, normé et utilisé intelligemment, moins il risquera d'y avoir des répercussions négatives pour les réseaux. »

D’autant plus que l'IA offre de nombreuses opportunités pour les franchises, notamment en matière d'analyse de données, d'automatisation des processus et de personnalisation des expériences client. Par exemple, les franchises peuvent utiliser l'IA pour analyser les tendances du marché et ajuster leurs stratégies en conséquence. De plus, les chatbots et les assistants virtuels peuvent améliorer le service client en fournissant des réponses rapides et précises aux questions courantes. 

Selon le 135ᵉ Baromètre de la confiance des dirigeants d’ETI Opinionway pour GrantThornton, 51% des patrons ont déjà intégré l'IA dans leur entreprise ou envisagent de le faire. Les principaux bénéfices attendus sont l'automatisation des tâches (71%), l'amélioration de la productivité des employés (45%), l'innovation dans les produits et services (31%), et une prise de décision plus éclairée (15%).

Cependant, l'adoption de l'IA comporte aussi des risques. Les algorithmes peuvent être biaisés et entrainer de mauvaises prises de décision. L'automatisation excessive peut également déshumaniser l'expérience client, ce qui peut nuire à la réputation de la franchise. Il convient donc de mettre en place des cadres éthiques et des politiques de transparence pour garantir que l'IA est utilisée de manière responsable et bénéfique.

L’importance de bien intégrer les outils d’intelligence artificielle

Vanessa Bouchara souligne l'importance d’intégrer ces outils, mais de manière organisée. « Ce que doivent faire les enseignes, et notamment les réseaux de franchise, c'est organiser l'exploitation des outils d'intelligence artificielle et ne pas faire comme si ça n'existait pas. »

L'adoption des outils d'IA nécessite une planification stratégique. Les franchises doivent évaluer leurs besoins spécifiques et identifier les solutions les plus adaptées. Cela peut être des outils d'analyse de données pour surveiller les performances, des outils de marketing automatisé pour améliorer les campagnes publicitaires ou encore des systèmes de gestion de la relation client (CRM) basés sur l'IA pour optimiser l'interaction avec les clients.

Il est surtout essentiel de former ses employés à l'utilisation de ces outils d’IA afin d’en maximiser les avantages tout en minimisant les risques. 

E-réputation et réseaux sociaux

Autre question abordée sur le sujet des enjeux du numérique dans l’univers de la franchise : Quelles sont les prérogatives du franchiseur et des franchisés en matière de communication digitale au sein d’un réseau de franchise ? Pour Vanessa Bouchara, dans le cadre d'un réseau de franchise, il est crucial de définir précisément les types de communication autorisés aux franchisés. « Le franchiseur va permettre aux franchisés de faire certaines communications […]. Ce qui est important, c'est de définir précisément quel type de communication, sur quel type de réseau social et aussi sur quel type de compte. »

Selon elle, deux options se présentent : 

• « Le franchiseur qui va tenir le compte de réseau social et qui va lui-même décider de poster tel contenu de son franchisé ; 
• mais vous avez de plus en plus le franchisé qui va créer un compte de réseau social lié à son exploitation. » 

L’avocate précise que, dans ce cas-là, le franchisé « devra demander l'autorisation du franchiseur. S'il ne le fait pas, il engage sa responsabilité personnelle, puisqu'il sera lui-même détenteur du compte. » Elle ajoute que les conséquences d’un manque de concertation entre franchiseur et franchisés peuvent impacter l’ensemble du réseau. « Le réseau peut être affecté d'une communication qui ne serait pas conforme à ses valeurs, à son image et à tout ce qui a été mis en place pour avoir une cohérence globale vis-à-vis de sa clientèle. »

La gestion de l'e-réputation est devenue une composante essentielle de la stratégie des franchises. Si une communication cohérente et bien orchestrée peut renforcer la notoriété de la franchise et fidéliser la clientèle, des communications inappropriées peuvent, à contrario, nuire gravement à la réputation du réseau. Pour éviter ces écueils, il est indispensable d’établir une ligne directrice claire en matière de communication, en définissant le type de contenus autorisé, les procédures d'approbation et les responsabilités de chaque partie.

Ce qu’il faut retenir

En résumé, Vanessa Bouchara souligne l'importance d'une gestion rigoureuse et proactive des outils numériques pour protéger sa marque et faire prospérer sa franchise à l'ère du numérique. La protection de la propriété intellectuelle, l'adoption stratégique de l'intelligence artificielle et la gestion rigoureuse de l'e-réputation sont essentielles pour naviguer avec succès dans ce paysage numérique en constante évolution. Pour cela, il est indispensable de s’entourer de professionnels expérimentés, tant en communication digitale qu’en matière de protection de la propriété intellectuelle.