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La franchise est l'art de maîtriser les paramètres moyens : interview de Jean-Michel ILLIEN, spécialiste de la franchise depuis 38 ans.

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Interview de Jean-Michel Illien : «La franchise est l'art de maîtriser des paramètres moyens»

Jean-Michel Illien est un spécialiste de la franchise depuis 38 ans. Ce consultant, connu et reconnu dans le milieu de la franchise, a dirigé durant 17 ans trois réseaux de franchises avant de fonder le cabinet spécialisé Franchise Management basé à Lyon depuis 1989. Membre du collège des experts et du comité scientifique de la Fédération Française de la Franchise, il accompagne les entreprises dans leurs démarches de franchiseurs.

Toute-la-Franchise : Qui peut devenir franchiseur ? Peut-on sur une idée, du « jour au lendemain » développer son réseau de franchise ?

Jean-Michel Illien : Non. La démarche de création d'une franchise doit respecter des conditions. Ces conditions sont pour résumer au nombre de 3.
La première est de disposer d'un bon concept bien évidemment. Le concept doit être testé. Si au bout d'un an le résultat est « profitable » en d'autres termes si le concept gagne de l'argent, il pourra le cas échéant être franchisé. Logiquement, on ne franchise pas une idée qui perd de l'argent !
La deuxième condition dans l'ordre chronologique c'est que le concept doit être duplicable. Si un franchisé moyen reproduit le concept à l'identique il doit au moins obtenir des résultats identiques. Cette condition implique que le concept d'origine ne repose pas sur des qualités exceptionnelles. Je m'explique. Si le concept est porté et testé par une personne à l'expérience remarquable, il n'est pas duplicable. Si je suis Michel-Ange et que mon concept est la peinture du plafond de la chapelle Sixtine, à l'évidence ce n'est pas duplicable. Un vainqueur de Roland Garros peut très bien apprendre à un franchisé à jouer au tennis mais pas faire de son franchisé un vainqueur de Roland Garros. La franchise est l'art de maîtriser les paramètres moyens.
La troisième et dernière condition est de pouvoir réunir les moyens de ses ambitions. Par moyens j'entends les moyens humains, techniques et financiers. Le plus dur pour un franchiseur est de réunir les moyens humains et de gérer son temps. Un chef d'entreprise qui travaille déjà 80 heures par semaine n'a pas forcément l'envie ni le ressort pour doubler sa somme de travail en créant une franchise. Pour les moyens techniques, notre cabinet est là pour apporter les bons outils. Pour ce qui concerne les moyens financiers, si le concept est bon il trouvera toujours des partenaires. Le nerf de la guerre est bien les hommes et le temps !
Si l'une de ces conditions n'est pas respectée, le dossier du franchiseur ne pourra pas aller bien loin.

Toute-la-Franchise : Comment teste-t-on un concept ? Comment savoir s'il est duplicable ?

Jean-Michel Illien : Le test d'un concept passe obligatoirement par la création d'un établissement pilote qui est en quelque sorte un prototype grandeur nature du concept. Le choix de l'emplacement du pilote doit respecter la moyenne pour être représentatif. De préférence, le pilote est créé dans une ville moyenne autour de 150 000 habitants avec de vrais vendeurs et de vrais clients. Si ça marche là, ça marchera certainement ailleurs. Il serait complètement ridicule de tester un concept sur les Champs Elysées pour des questions de coûts mais aussi pour des questions de représentativité des clients potentiels. Le pilote doit être le reflet d'un réalité de clientèle. Le temps de test est au moins d'un an pour avoir le temps d'un bilan et avoir en main un compte de résultat. Pour l'export, chaque nouveau pays doit aussi faire l'objet d'un pilote. Chaque pays a en effet ses particularités en terme de coûts d'emplacement, de coût salarial, d'habitude de consommation... Ce qui marche en France ne marchera pas forcément tel quel à l'étranger. Le concept devra s'adapter.

Toute-la-Franchise : Quels éléments permettent de différencier un « bon » franchiseur d’un « moins bon » ?

Jean-Michel Illien : Un bon franchiseur doit au moins remplir les trois conditions précédentes. Ensuite, le franchiseur pour réussir doit mettre en place et savoir utiliser les outils à sa disposition pour le développement de son réseau, la formation, l'animation... Il ne suffit pas de disposer des outils pour bien les utiliser. Un franchiseur peut avoir un beau compte-rendu de réunion d'animation sans savoir l'analyser ! D'où l'intérêt d'être accompagner par des spécialistes.

Toute-la-Franchise : Qu’est-ce qui permet à un franchiseur de durer efficacement dans le temps ?

Jean-Michel Illien : C'est une question intéressante... Le franchiseur pour durer doit prendre conscience que le management de sa franchise devra évoluer dans le temps. L'évolution du management fait partie intégrante de la longévité pour deux raisons. La première tient au fait qu'avec le temps, chaque franchisé devient expert de l'enseigne. Et on ne manage pas de la même manière un expert et un débutant. La seconde raison tient à l'ampleur que prend le réseau. On ne manage pas un réseau à l'identique selon qu'il a 3, 30 ou 300 franchisés. Si au début le franchiseur doit être au four et au moulin, et qu'il se charge lui-même des commandes de cartes de visite de ses franchisés à l'imprimeur par exemple, au bout d'un certain nombre de franchisés, s'il doit toujours décrocher son téléphone pour commander les cartes de visite de ses 300 franchisés, c'est qu'il a raté quelque chose !

Toute-la-Franchise : Vous-même en tant que professionnel très affirmé et connu de la franchise, acceptez-vous tous les dossiers qui se présentent à vous ? Pourquoi ?

Jean-Michel Illien : Si je prends la moyenne sur 2008 et 2009, nous avons accepté environ 1 dossier sur 3. Nous refusons les dossiers qui ne sont pas aboutis. Lorsque le futur franchiseur n'est pas prêt, qu'il n'a pas assez de recul sur son projet, nous préférons refuser son dossier pour lui éviter des déconvenues. Nous refusons aussi les dossiers qui ne répondent pas au minimum aux trois premières conditions que nous avons évoquées au début de notre entretien. Les franchiseurs qui n'ont pas les moyens financiers ni les moyens humains maintenant ne peuvent raisonnablement pas imaginer de monter un réseau de franchise. Nous refusons aussi les projets qui ne sont pas profitables. Si le pilote n'est pas totalement positif, que les consommateurs n'accrochent pas, inutile d'insister. Le consommateur est le seul juge de paix aussi bien en BtoB qu'en BtoC. Enfin, nous refusons aussi les projets qui ne rentrent pas dans notre vision vertueuse de la franchise. Depuis 38 ans que nous faisons de la franchise, nous avons suffisamment de recul pour savoir qu'il ne sert à rien d'embarquer les gens dans une galère.

Toute-la-Franchise : La qualité des franchiseurs ces dernières années a-t-elle concrètement évolué ?

Jean-Michel Illien : Assurément oui ! Et l'évolution va dans le bon sens ! En 2009, les franchiseurs sont notablement plus professionnels qu'il y a 10 ou 20 ans. Tous savent beaucoup mieux ce qu'est le métier de franchiseur. De l'autre côté de la barrière, les futurs franchisés sont aussi beaucoup plus regardants sur les propositions de franchise. La démarche est plus professionnelle au moment du choix. La recherche est bien plus pertinente que par le passé.

Dominique, Journaliste toute-la-franchise.com ©
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