Financement de franchise : ce que les banques attendent vraiment d’un franchisé
Comprendre les attentes bancaires pour mieux financer sa franchise
Créer son entreprise en franchise ne se résume pas à choisir un bon concept. Ni à trouver un local bien placé. Encore faut-il réunir les fonds pour se lancer. Et sur ce terrain, les candidats sont nombreux à buter. Quel niveau d’apport faut-il viser ? Jusqu’où le franchiseur accompagne-t-il son futur franchisé ? Qu’attendent réellement les banquiers lorsqu’ils examinent un dossier ?

Réunis lors d’une table ronde organisée sur Franchise Expo Paris, trois experts de la création d’entreprise en franchise décryptent les ressorts d’un financement professionnel réussi, et les conditions d’obtention d’un prêt bancaire pour franchisé. Leur point commun ? Une vision pragmatique du financement, loin des discours théoriques. Objectif : comprendre ce qui fait la différence entre un projet qui convainc… et un dossier qui reste lettre morte.
Apport personnel du franchisé : la clé pour débloquer un financement
C’est la toute première variable que regarde une banque. Et, très souvent, la première difficulté pour les porteurs de projet. Dans un financement en franchise, l’apport personnel n’est pas une formalité : c’est la base de tout.
« En tout premier lieu, on va déjà essayer de comprendre le projet [du candidat à la franchise] et comprendre l'humain », explique Anne-France Kunz, directrice des franchises Beauty Success. « Mais très vite, la question de l’apport personnel s’impose. S’il est en dessous de 35% du budget total, on va arrêter tout de suite ou essayer de trouver des solutions pour l’avoir. »
Le message est clair : en dessous de ce seuil, difficile d’embarquer un partenaire bancaire. Une exigence confirmée par Benoît Fougerais, directeur du Pôle professionnels chez AFR Financement : « L’apport, c’est déterminant. Et je suis ravi de l’entendre, parce que, malheureusement, trop souvent, des franchiseurs perdent du temps avec des candidats non finançables faute d’apport. »
Les repères sont bien établis : pour espérer un crédit professionnel en franchise, comptez entre 30 et 35% d’apport pour une création, et entre 20 et 25% pour une reprise.
Mais attention, un apport jugé insuffisant ne condamne pas un projet pour autant. Il sert surtout de point de repère pour construire un plan de financement adapté, essentiel pour obtenir un prêt bancaire en franchise. Anne-France Kunz évoque plusieurs leviers pour compléter l’apport : soutien familial, prêt d’honneur ou encore dispositifs portés par les Chambres de commerce. L’idée n’est pas d’écarter le candidat, mais d’être lucide sur les conditions de faisabilité.
Même logique chez Benoît Fougerais, qui rappelle que ce ratio d’apport s’applique non pas au coût global, mais à la partie financée par la banque. « Si on vient diminuer cette dette bancaire – via du leasing, du financement participatif, des aides ou subventions, le pourcentage d’apport reste le même, mais le montant diminue. »
Autrement dit : un apport plus faible peut suffire… si le plan de financement est construit intelligemment.
Business plan et posture : convaincre une banque de financer votre franchise
Avoir l’apport requis, c’est bien. Mais ce n’est qu’une pièce du puzzle. Encore faut-il convaincre la banque que le projet tient la route. Et cela commence par un business plan structuré, réaliste… et surtout, incarné.
Chez Beauty Success, l’accompagnement est rôdé. « Sur une matrice qui a fait ses preuves depuis 30 ans, on aide le candidat à bâtir un business plan correct et acceptable vis-à-vis d’un banquier », explique Anne-France Kunz.
Mais il ne s’agit pas de tout faire à sa place : « Le franchisé doit le bâtir lui-même, quitte après à simuler, à faire des entretiens. Il va s’entraîner avec nous à présenter son projet auprès du banquier. » Parce qu’au-delà du fond, la forme compte tout autant. « Il faut qu’il apprenne à être convaincant. Et qu’il fasse ressentir toute sa préparation de dossier, la solidité du projet. »
Même mise en garde du côté de Benoît Fougerais : pas question que le franchiseur se substitue au franchisé. « Pas de franchiseur aux rencontres bancaires, parce que, effectivement, la frontière est très fine entre l’accompagnement et l’ingérence. » En revanche, rien n’empêche le réseau de fournir des éléments factuels — bilans, résultats consolidés, retour terrain — pour outiller son franchisé. Mais le prévisionnel reste son affaire.
Et pour éviter de se retrouver démuni face aux questions d’un banquier ? « Simuler des entretiens, c’est une excellente manière de faire », confirme l’expert. « Comme toutes les banques posent les mêmes questions, ce sont toujours les mêmes réponses. Donc, ça se prépare. »
Quel rôle joue le franchiseur dans le financement bancaire ?
Si le franchiseur n’assiste pas à l’entretien bancaire, son empreinte, elle, est bien présente dans le dossier, les chiffres, la réputation du réseau. Et c’est là que le rôle du franchiseur prend toute sa dimension : structurer la relation bancaire, et rassurer les financeurs.
« On référence notre enseigne auprès des banquiers », explique Arthur Azzopardi, cofondateur du jeune réseau de restauration Faiparla. « Ce qui permet que, peu importe où notre franchisé ouvrira, la banque connaisse déjà le concept. »
Même logique chez Beauty Success, et ce, malgré une notoriété déjà bien établie. « Il faut parfois se bagarrer un peu », admet toutefois Anne-France Kunz. « Parce que les pôles franchise nationaux ne descendent pas forcément au niveau local. Et on se retrouve avec des agences qui n’ont pas la connaissance des présentations faites en national. »
Pour combler ce décalage, certains comme Benoît Fougerais s’appuient sur des relais de terrain : « On travaille avec les pôles franchise, mais surtout avec les responsables marchés pro et entreprises, banque par banque, département par département. »
Autre gage de sérieux d’un réseau apprécié des banques : la capacité à tester les évolutions du concept en interne, avant de les déployer. « Nous avons un certain nombre de magasins qui appartiennent aux membres fondateurs », précise Anne-France Kunz. « Quand on prend une nouvelle orientation, on la teste d’abord en intégré. »
Cette démarche est un signal fort pour les banques : le franchiseur ne se contente pas d’animer un réseau, il prend des risques, il expérimente, il s’implique. Et c’est toute la différence.
Jeunes réseaux : prouver la solidité du concept malgré le manque d’historique
Pas facile de lever des fonds quand on n’a ni ancienneté ni bilans consolidés. Mais ce n’est pas impossible. À condition d’adopter une approche méthodique, transparente… et assumée.
« Forcément, les banques préfèrent un réseau qui a X années d’ancienneté, plein de bilans et qui est très stable », reconnaît Arthur Azzopardi. « Mais il y a toujours des alternatives. » La première : réduire l’investissement de départ. « On travaille sans extraction, avec des petits établissements. Ça nous permet d’avoir des investissements moins élevés, et donc de rassurer sur le risque. »
Deuxième levier : assumer son positionnement. Là où certains essaient de masquer leur jeunesse, Faiparla en fait un atout. « On est un jeune réseau. Et c’est justement ce qui fait notre force. On est dynamique, mobile, avec un produit qui plaît. » Mais cette énergie ne suffit évidemment pas. Il faut accompagner les franchisés dans le concret poursuit Arthur : montage de dossier, mise en relation avec des courtiers, référencement bancaire… Et surtout, démontrer que ça fonctionne.
Les résultats terrain réalisés par les pilotes achèvent de bâtir la crédibilité du projet. « On est partis de zéro, avec un nouveau produit. Et on a fait deux fois plus de résultats que ce qu’on avait annoncé au banquier », se félicite-t-il. « Autant vous dire qu’ils nous ont rappelés avec le sourire. »
Ce retour d’expérience illustre un point essentiel : les banques n’exigent pas un passé glorieux, mais un futur crédible. Dès lors que le modèle économique est cohérent, que le réseau joue son rôle, et que les chiffres des pilotes sont au rendez-vous, un jeune réseau peut parfaitement convaincre.
Un projet de franchise finançable, ça se construit
Convaincre une banque ne repose jamais sur un seul facteur. Ce n’est ni l’apport seul, ni le concept, ni même la motivation du candidat qui fait la différence. C’est l’ensemble du dispositif qui compte.
Un apport suffisant reste la base, mais il doit s’inscrire dans un montage de financement structuré, crédible et réaliste. Ce qui fait pencher la balance, c’est un projet maîtrisé de bout en bout : un business plan clair, une préparation rigoureuse, un accompagnement structuré. Et surtout, un porteur de projet prêt à défendre son ambition.
« L’humain, c’est une des clés de réussite », rappelle Anne-France Kunz. « En dehors de l’emplacement, c’est la personne qui est derrière, avec son équipe. Il faut qu’il soit convaincant, convaincu, et préparé. » C’est là que tout se joue. Et c’est là que les bons franchiseurs font toute la différence.
Pour découvrir l’intégralité des échanges et les conseils pratiques partagés par les intervenants, retrouvez ci-dessous la vidéo de la table ronde enregistrée à Franchise Expo Paris :