Crise économique et nouvelles habitudes d'achat : Comment le commerce se transforme
Les tendances du commerce selon l'Observatoire du commerce indépendant
Dans un contexte économique difficile, les commerces français s'adaptent pour répondre aux nouvelles habitudes de consommation des Français. L'Observatoire du commerce indépendant(1), une étude réalisée par Ankorstore en partenariat avec le Conseil du Commerce de France, met en lumière les transformations en cours. Cette étude révèle des tendances intéressantes et propose des pistes pour l'avenir du commerce en France. Entre augmentation des prix, baisse de la fréquentation, et essor de l'omnicanalité, découvrez comment le commerce s'adapte au contexte économique et se projette.
De nouvelles habitudes d'achat face à la crise
Face à l'inflation grandissante, les consommateurs français ont adapté leur comportement d'achat. D'après l'Observatoire du Commerce indépendant, un quart des commerçants (26%) note que la consommation est de plus en plus dictée par la recherche du prix le plus bas. Près de la moitié (53%) des répondants constatent que leurs clients comparent les prix en ligne avant de se rendre en magasin. Cette tendance est particulièrement prononcée dans les boutiques de mode, de coiffure et de beauté.
Les consommateurs confirment ces observations, 94% d'entre eux admettent que l'augmentation des prix a eu un impact significatif sur leurs habitudes d'achat. Les secteurs du prêt-à-porter (85%) et des produits alimentaires (84%) sont les plus affectés par ces changements, qui ont donné lieu à une nouvelle logique de consommation axée sur la recherche du prix le plus bas. La tendance est d'autant plus marquée chez les 18-24 ans, en particulier dans le domaine de l'alimentation. Plus de la moitié (52%) de cette tranche d'âge opte pour les offres les plus abordables, contre 40% pour l'ensemble des répondants.
Parallèlement, la fréquentation des commerces indépendants a diminué. Le manque de clients est cité comme la principale difficulté par 48% des commerçants interrogés. Cette baisse de fréquentation des commerces est particulièrement ressentie en Bretagne, en Normandie et dans les secteurs de la beauté, de la coiffure et du sport.
Environ 38% des consommateurs qui délaissent les commerces indépendants indiquent ne pas privilégier ces boutiques en raison de l'absence de promotions, ce qui va à l'encontre de la perception de nombreux commerçants. En effet, 31% estiment que leurs clients n'attendent pas les promotions ou les déstockages pour effectuer leurs achats.
Commerçants face à l'inflation : une pression croissante sur le secteur
L'inflation n'a pas seulement affecté la fréquentation des commerces, elle a également engendré une hausse significative de leurs frais fixes. Cette situation crée un double défi pour les professionnels du commerce indépendant. L’étude révèle que 72% des commerçants constatent que l'inflation a eu un impact direct sur leur activité. Les magasins dédiés au bien-être (77%) et les épiceries fines (78%) étant les plus touchés.
82% des commerçants décrivent leur situation comme "tendue" voire "très difficile". Des régions et des secteurs d'activité spécifiques se distinguent notamment : la Normandie (85%), l'Occitanie (86%) et la Nouvelle-Aquitaine (88%) sont particulièrement touchées. Et les secteurs de la cosmétique, de la coiffure, du sport, de la beauté et des loisirs, sont ceux qui souffrent le plus de la contraction de la consommation et des arbitrages des consommateurs.
En ce qui concerne les performances financières, seuls 44% des commerçants interrogés ont enregistré une augmentation de leur chiffre d'affaires en 2022 par rapport à l'année précédente, qui avait déjà été difficile pour le commerce physique.
L'Observatoire met toutefois en lumière des signes positifs dans ce contexte difficile. En effet, 34% des professionnels notent des ouvertures de nouveaux établissements dans leur ville. Les régions les plus dynamiques en la matière sont la Bretagne (48%) et la Normandie (46%).
Des choix stratégiques pour rester compétitif
Face à la pression croissante de l'inflation, les commerçants se voient contraints de faire des choix stratégiques pour maintenir leur compétitivité. Selon l’étude, ces choix passent par la réduction des dépenses, notamment par la diminution des volumes de commandes (31%) et la réduction des frais courants (22%). En outre, une grande prudence est observée en matière de recrutements : en 2022, 79% des commerçants n'ont effectué aucune embauche et seulement 10% prévoient de le faire cette année.
Confrontés à des coûts en hausse, les commerçants sont souvent obligés d'augmenter leurs prix ou de réduire leurs marges. En 2022, 43% ont choisi cette dernière option, évitant d'augmenter leurs tarifs. Cependant, certaines régions, comme l'Île-de-France, ont connu une augmentation significative des prix. Les coiffeurs (85%) et les épiceries fines (78%) sont ceux qui ont le plus fortement répercuté ces augmentations de coûts sur leurs prix.
En 2023, cette tendance pourrait se maintenir. Seuls 13% des commerçants n'envisagent pas d'augmenter leurs prix, tandis que 29% restent indécis. Les habitants de Provence et de Nouvelle-Aquitaine, ainsi que les amateurs d'épiceries fines, pourraient particulièrement ressentir cette augmentation des prix en magasin.
Par ailleurs, face à la baisse de la fréquentation et à la concurrence, les commerçants mettent l'accent sur leur visibilité. 28% d'entre eux ont renforcé leur communication et leur présence numérique, notamment sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, 77% des commerçants indépendants sont actifs sur les réseaux sociaux. Ce taux atteint même 92% pour les magasins destinés aux enfants, suivi des concept stores (91%) et des épiceries fines (88%).
L'intérêt pour le numérique est particulièrement marqué chez les 18-34 ans, 94% d'entre eux étant actifs sur les réseaux sociaux (100% pour les 18-24 ans), contre 65% pour les plus de 55 ans. Ces chiffres mettent en évidence la nécessité pour les commerçants d'adapter leurs stratégies aux nouveaux défis économiques et d'exploiter les outils numériques pour renforcer leur visibilité et leur compétitivité.
Les commerçants et l'omnicanalité
A l’ère du numérique, une approche de vente intégrée qui vise à offrir une expérience client fluide à travers les canaux physiques et numériques s'impose. L'omnicanalité n’est pas une alternative mais une nécessité pour les commerçants. La crise sanitaire a mis en exergue que le commerce de quartier ne se résume pas à une simple transaction mais se construit autour d’une relation et des interactions entre le client et l'entreprise.
L'atout majeur des commerçants indépendants réside donc dans leur capacité à nouer des relations de proximité avec leurs clients, un avantage qui les distingue de la grande distribution et des plateformes de vente en ligne. Cependant, pour répondre aux attentes changeantes des consommateurs, ces commerçants doivent également embrasser la digitalisation pour offrir un parcours d'achat amélioré, combinant le service et la proximité des boutiques physiques avec la commodité du e-commerce. En d'autres termes, ils doivent adopter une stratégie omnicanale.
Pour autant, l'Observatoire du Commerce indépendant révèle que moins de la moitié des vendeurs (43%) considèrent l'omnicanalité comme un modèle d'avenir pour le commerce. Si 77% d'entre eux utilisent les réseaux sociaux, seuls 46% disposent d'un site de vente en ligne. L'Île-de-France et la Bretagne sont les deux seules régions françaises où la majorité des commerces physiques possèdent un site de vente en ligne (respectivement 58% et 51%).
Comment expliquer cette faible adoption de l'omnicanalité parmi les commerçants ? Les raisons invoquées incluent le manque de temps (28%) et l'opinion que le e-commerce n'est pas pertinent pour leur activité. Il convient de noter que les commerces dédiés à la cosmétique et à la beauté font exception dans ce panorama, 70% d'entre eux étant dotés d'une solution de vente digitale.
Commerce de proximité : Optimisme et soutien des consommateurs
Malgré cette conjoncture économique difficile, les commerçants restent majoritairement optimistes quant à l'avenir. Selon un indice de confiance allant de 0 à 10, 68% se montrent confiants dans la santé de leur secteur pour l'année 2023 (de 5 à 10), dont 26% très confiants (de 7 à 10). Les professionnels les plus optimistes se trouvent dans la région du Grand Est (72%) et en Normandie (71%), tandis que les commerçants de la région Occitanie (63%) et du Centre-Loire (61%) sont moins nombreux à être optimistes.
Cette confiance est soutenue par l'affection du public français pour les commerces de proximité. A prix égal, 52% des Français privilégient les commerces de proximité plutôt que la grande distribution (28%) ou les sites e-commerce (11%). Ces commerces de proximité jouent un rôle crucial dans la vitalité des territoires et le maintien du tissu social. 97% des commerçants estiment qu'ils ont un rôle à jouer dans la revitalisation des centres urbains. De plus, 31% estiment qu'ils contribuent à l'attractivité des centres-villes, 26% qu'ils sont moteurs de l'animation des quartiers et 28% qu'ils créent du lien social.
Les citoyens français partagent ces convictions. 78% voient les commerces comme des facteurs d'attraction ou d'animation des centres-villes, et 74% comme des créateurs de lien social. 72% pensent même qu'ils aident à limiter l'exode urbain et à attirer de nouveaux habitants dans les villes.
En outre, les commerces de proximité jouent un rôle clé dans la transition vers une consommation plus responsable. Ils constituent une alternative à la grande distribution et répondent aux préoccupations environnementales actuelles. 50% des Français estiment que l'un des principaux atouts des commerces indépendants est leur offre de produits locaux. Cette tendance est particulièrement notable dans les Hauts-de-France (37%) et dans certains types de magasins, comme les épiceries fines et les magasins de beauté (37%).
Enfin, les commerces de proximité sont appréciés pour leur niveau d'expertise. 35% des consommateurs saluent ce point, et 37% des professionnels estiment que l'avenir du commerce indépendant passera par une offre plus pointue et des conseils précis et personnalisés.
Ces tendances illustrent l'attachement des Français à leurs commerces de proximité. Elles soulignent également le rôle essentiel que ces commerces jouent dans l'animation des centres-villes et dans la transition vers une consommation plus durable et plus locale.
Une nouvelle dynamique à venir ?
Face à la crise, les commerçants doivent donc se réinventer et repenser leur modèle économique à travers une présence digitale forte et l'adaptation à une clientèle de plus en plus axée sur les prix et l'innovation dans le choix des produits. Nombre de commerçants envisagent également de se rapprocher des associations de commerçants locales qui offrent un soutien en matière de communication, de lobbying et de mutualisation des ressources.
Si les défis sont nombreux, les opportunités le sont tout autant, notamment dans le développement durable et la responsabilité sociale des entreprises (RSE). Un nombre croissant de commerçants envisage de proposer une offre plus respectueuse de l'environnement et d'intégrer des critères RSE dans leur stratégie à court et moyen terme. Une stratégie qui répond à une forte attente des consommateurs.
(1)Retrouvez le rapport de l’Observatoire du commerce indépendant : Quelles tendances de consommation et quel modèle d’avenir pour le commerce indépendant ? sur le site d’ankorstore