La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE) : Un levier de performance
L'avenir est à la RSE : Comment les entreprises peuvent en tirer parti
En mettant l'accent sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE), l'Union Européenne et la France ont instauré une obligation légale pour les grandes entreprises, celles comptant plus de 500 employés, de publier des rapports extra-financiers concernant leurs impacts environnementaux et sociétaux. Bien que les plus petites entreprises ne soient pas soumises à cette exigence, elles ont tout à gagner à adopter des pratiques RSE. Non seulement ces démarches contribuent à la préservation de l'environnement et à l'établissement de nouvelles formes de gouvernance, mais elles peuvent également améliorer les performances de l'entreprise à divers niveaux. Découvrez un aperçu détaillé de la RSE, de son histoire, de sa mise en œuvre, et de ses bénéfices pour l'entreprise.
Responsabilité Sociétale des Entreprises : définition et histoire
Il existe aujourd’hui un consensus pour établir que les bases de la RSE ont été posées par un économiste américain, Howard Bowen, au travers de son ouvrage, Social Responsibilities of the Businessman, publié en 1953. Sous ce titre transparent, il évoque ce qui constitue pour lui les responsabilités des entrepreneurs vis-à-vis de leurs salariés et de la société dans son ensemble. Si l’ouvrage a fait grand bruit, il suffit d’observer les 60 dernières années pour se rendre compte que son impact sur le mode de fonctionnement des grandes entreprises mondiales a été… relatif.
La RSE pour réconcilier les entreprises avec le monde dans lequel elles évoluent
Toutefois, vers la fin du millénaire, cette réflexion sur la responsabilité sociétale des entreprises est revenue sur le devant de la scène. En effet, la légitimité institutionnelle de l’entreprise est « fondée sur sa participation au bien-être collectif en produisant les biens et services nécessaires à son fonctionnement et en donnant aux travailleurs les moyens d’une intégration sociale. Cependant, les entreprises ont de plus en plus de mal à affirmer leur légitimité aux yeux de la société dans un contexte de saturation de la demande, de chômage, d’exclusion sociale et de pollution industrielle. Elles doivent désormais trouver de nouvelles justifications de leur rôle dans la société, en ajoutant à leur fonction économique une vocation sociétale. » (Patricia Thiery, Marketing et responsabilité sociétale de l’entreprise : entre civisme et cynisme, in Décisions Marketing n°38 Avril-Juin 2005, pp 59-69). Dès lors, la responsabilité sociétale des entreprises apparaît non plus comme un devoir mais comme un moyen de réconcilier les entreprises avec le monde dans lequel elles évoluent.
Définition de la RSE par la Commission mondiale sur l'environnement et le développement (CMED)
Publié en 1987 par la Commission mondiale sur l'environnement et le développement de l'ONU, le Rapport Brundtland a joué un rôle central dans l'établissement du concept de développement durable et du concept actuel de responsabilité sociétale des entreprises. Présidée par la Norvégienne Gro Harlem Brundtland, la commission a introduit une nouvelle expression - "sustainable development", en français "développement durable" - et a fourni une définition qui continue d'influencer non seulement les politiques environnementales, mais aussi les pratiques commerciales à travers le monde.
Selon le rapport Brundtland, le développement durable est une approche qui permet de répondre aux besoins des générations actuelles sans compromettre la capacité des générations futures à subvenir aux leurs. Ce concept repose sur deux notions clés : la satisfaction des besoins – en particulier ceux des plus défavorisés – qui doit être une priorité, et la reconnaissance des limites imposées par nos techniques et notre organisation sociale sur la capacité de l'environnement à répondre aux besoins présents et futurs. Ce document précurseur a posé les bases du Sommet de la Terre de 1992 et continue à influencer les discussions environnementales à ce jour.
C'est cette vision qui a évolué pour englober la RSE, incitant les entreprises à prendre en compte les impacts sociaux et environnementaux de leurs activités. Le rapport Brundtland a donc non seulement pavé la voie au Sommet de la Terre de 1992, mais a aussi posé les fondations pour une nouvelle ère de la conduite des affaires, où le succès ne se mesure pas seulement en termes de profits, mais aussi en termes de contribution positive à la société et à l'environnement.
C’est quoi la RSE appliquée en entreprise ?
En pratique, donc, la responsabilité sociétale d’une entreprise peut être mise en œuvre de deux manières différentes, mais complémentaires :
- Les objectifs sociaux et environnementaux hors business : dons à des associations, sponsoring d’événements, etc. Ils sont donc déconnectés de la stratégie de l’entreprise.
- Les objectifs sociaux et environnementaux intégrés aux activités de l’entreprise.
La première approche, souvent appelée philanthropie d'entreprise, implique que l'entreprise alloue une part de ses bénéfices ou de son chiffre d'affaires à une organisation caritative choisie en fonction de ses valeurs et de son activité. Cette démarche représente déjà une importante contribution à une gestion d'entreprise plus responsable. Il convient de noter que cette forme de mécénat d'entreprise est encouragée par des incitations fiscales, avec une réduction d'impôts équivalente à 60% des sommes versées aux associations, jusqu'à deux millions d'euros de don, et 40% au-delà.
La deuxième approche se concentre sur l'intégration des objectifs sociaux et environnementaux dans les activités quotidiennes de l'entreprise. Cela peut se traduire par une variété d'initiatives, allant de l'adoption de pratiques de travail équitables à la mise en œuvre de procédures de production respectueuses de l'environnement. Cette approche permet non seulement d'aligner les opérations de l'entreprise avec les principes de la RSE, mais aussi de faire du développement durable une partie intégrante de sa stratégie commerciale à long terme.
Ces deux approches ne sont pas mutuellement exclusives mais peuvent être mises en œuvre conjointement pour un impact social et environnemental plus grand.
Introduction à la RSE : Le cas exemplaire de Patagonia
Lorsque l’on s’intéresse à la RSE, il est une entreprise qui constitue un cas d’école. Il s’agit de Patagonia. Le fabricant nord-américain de vêtements techniques dédiés aux sports outdoor est renommée pour sa double approche de la RSE, intégrant à la fois des objectifs sociaux et environnementaux dans sa stratégie d'entreprise et contribuant à ces objectifs en dehors du cadre de son activité principale.
Origines de Patagonia et sa vision environnementale
Pour mieux comprendre, il faut revenir à la création de l’entreprise. Nous sommes en 1972 et Yvon Chouinard, passionné de surf et d’escalade, fait le constat que les pratiquants d’escalade endommagent les parois qu’ils gravissent avec leurs pitons. Il décide alors de concevoir et de fabriquer un système d’accroche respectueux de l’environnement : les coinceurs. Sept mois plus tard, près des trois quarts des pratiquants dans le monde utilisent son innovation ! Face à la demande, il crée Patagonia.
Patagonia : Un acteur majeur de la mode durable
Rapidement la marque étend ses activités à la fabrication de vêtements techniques, activité notoirement réputée pour son impact considérable sur l'environnement. Par conséquent, son fondateur décide, dès le départ, de réduire tant que possible cet impact. L'entreprise adopte des pratiques durables telles que :
- l'utilisation de coton biologique et de matériaux recyclés pour la fabrication de ses produits,
- la réparation des produits endommagés,
- la construction d'un centre de distribution à partir de matériaux recyclés et équipé de panneaux photovoltaïques,
- l'offre d'avantages aux employés tels qu'une cafétéria bio, des vélos en libre-service, une crèche gratuite et la possibilité de travailler bénévolement pour des associations tout en continuant à percevoir leur salaire.
La gouvernance de Patagonia reflète également son engagement en matière de RSE, avec une intégration de diverses parties prenantes : employés de l’entreprise, associations environnementales mais aussi des fournisseurs, des clients, etc.
Un engagement environnemental au-delà de la stratégie d'entreprise
Dans sa stratégie, son organisation, son fonctionnement et sa relation avec son environnement ainsi que ses parties prenantes, Patagonia s’inscrit dans une démarche résolument responsable et engagée. Mais elle va plus loin puisqu’elle fonde, avec plusieurs autres entreprises, le "1% pour la planète", une initiative invitant les entreprises à donner 1% de leur chiffre d'affaires à des associations de protection de l'environnement.
En 2018, l’enseigne économise 10 millions de dollars grâce aux exonérations fiscales de l’administration Trump et a fait don de la totalité de cette somme à des associations environnementales. Et ce, tout en publiant un communiqué de presse dans laquelle elle accuse le Président des États-Unis d’être criminel, ces sommes devant servir, selon Patagonia, aux plus démunis et à la préservation de la planète !
Évidemment, le cas Patagonia est extrême. En outre, l’entreprise réalisant plus de 800 millions d’euros de chiffre d’affaires (en 2019), avec une croissance annuelle de 10%, elle peut se permettre de faire des choix radicaux en matière de gouvernance, de respect de l’environnement et de dons à des associations. Cependant, il est important de noter que la croissance remarquable de Patagonia est fortement liée à ses positions, notamment son respect de l'environnement et de ses employés. Le modèle de Patagonia offre des leçons précieuses et des pistes à explorer et a adapter en fonction des capacités et des valeurs propres à chaque entreprise.
Approches RSE accessibles : exemples pratiques
Première phase : évaluation et action
Les initiatives labellisées "Responsabilité Sociétale des Entreprises" (RSE) sont à la portée de toutes les organisations. Comme le souligne Novethic, l'accélérateur de transformation durable du Groupe Caisse des Dépôts, le premier pas est l'évaluation. Cela implique de mesurer les impacts environnementaux et sociaux et les déficits de gouvernance de sa société.
- La consommation d'électricité, d'eau, de papier, de carburant peut être réduite par diverses stratégies économiques (et potentiellement très rentables), diminuant ainsi l'empreinte environnementale de l'entreprise.
- Etudier la possibilité d’utiliser des matières premières ou des produits recyclés provenant d'autres entreprises locales.
- Valoriser les déchets produits par l’entreprise.
- Favoriser l’embauche de personnes exclues du marché du travail.
- Promouvoir l'égalité entre les sexes.
- Adopter des approches de gestion participative.
- Etc.
Deuxième phase : communication
Comme mentionné précédemment, l'un des principaux aspects de l'approche RSE est la publication de rapports extra-financiers. Ces rapports remplissent plusieurs objectifs. Ils garantissent la transparence de l'entreprise en ce qui concerne son impact sociétal et environnemental, et surtout, les mesures prises pour réduire ou améliorer cet impact. Mais ces obligations (pour les entreprises de plus de 500 employés) peuvent devenir de réels outils de marketing. Une fois l'entreprise engagée dans la démarche RSE, elle peut valoriser cette initiative auprès de ses clients, partenaires et prospects.
Les citoyens, consommateurs et employés sont en quête de sens et de valeurs, ce que la RSE apporte justement. C'est pourquoi communiquer sur les engagements RSE permet :
- d'améliorer l'image de l'entreprise ;
- d'attirer de nouveaux employés ;
- d'accéder à des marchés durables ;
- etc.
Il suffit pour s’en convaincre de se souvenir que Patagonia enregistre une croissance annuelle de 10% en moyenne depuis des décennies. Et ce, en grande partie en raison de ses engagements en faveur de l’environnement et du bien-être des salariés.
Une politique RSE pour des avantages durables
Mais les avantages dépassent largement le cadre des bénéfices marketing obtenus en communiquant sur les stratégies RSE mises en œuvre. En effet, la RSE permet :
- de faire des économies (d'eau, de chauffage, d'électricité, de carburant, de fournitures de bureau, etc.) ;
- de découvrir de nouvelles opportunités (à travers l’économie circulaire notamment, en valorisant les déchets par exemple ; mais aussi de nouveaux marchés, accessibles exclusivement aux entreprises responsables) ;
- de réduire l'absentéisme et les arrêts de travail (grâce à une gouvernance incluant davantage les employés, mais aussi en optimisant les postes de travail et en réduisant les risques liés à l'activité) ;
- etc.
Se faire aider dans sa démarche RSE
Depuis 2013, le gouvernement a mis en place une plateforme dédiée à la RSE. Cet espace de dialogue et de concertation a pour objectif de promouvoir le concept de Responsabilité Sociétale des Entreprises, d'informer et de favoriser les échanges sur les bonnes pratiques et les stratégies à suivre. De son côté, le site Novethic.fr propose également une multitude de solutions pour instaurer une stratégie RSE et/ou obtenir de l'aide dans cette démarche.
Il existe donc de nombreux leviers pour devenir une entreprise RSE et de nombreux avantages à le faire, chacun à son échelle. Alors, pourquoi pas vous ?