Nullité des contrats de réservation de zone fondée sur l’absence d’information précontractuelle (CA Aix en Provence RG n°13/01167)
Le cabinet Gouache Avocats revient sur les conditions de nullité de contrats de réservation de zones.
Suite à la diffusion d’une publicité par un réseau de concession prônant divers avantages financiers notamment caractérisés par l’absence de frais, de droit d’entrée et de royalties, un concessionnaire conclura deux premiers contrats avec le concédant.
Le premier, s’intitulant « accord de préemption à terme », lui accorde un droit de préemption temporaire de 8 jours sur une zone territoriale en contrepartie du versement au concédant d’une somme de 2.000 euros. Le second, intitulé « accord des parties » et postérieur au premier, lui permet la distribution exclusive des produits du concédant en ce compris, une exclusivité territoriale, moyennant le versement d’une somme de 31.000 euros. Le concessionnaire signe par la suite un contrat de concession commerciale avec le concédant.
Le concessionnaire assigne le concédant aux fins de voir prononcer la nullité des deux premiers contrats conclus, faute de s’être fait délivré, avant leur signature, un DIP lui permettant de s’engager en connaissance de cause.
La Cour d’appel rappelle dans un premier temps les dispositions de l’article L.330-3 du Code de commerce qui prévoient, d’une part, la délivrance d’un document d’information précontractuel (DIP) dans le cadre d’une relation contractuelle comportant une obligation d’exclusivité en contrepartie d’une mise à disposition d’enseigne, marque ou nom commercial, et d’autre part, l’obligation de préciser par écrit les prestations exécutées en contrepartie du versement de la somme d’argent dans le cadre d’un contrat de réservation de zone. Cet article impose la délivrance du DIP vingt jours au moins avant la signature du contrat ou avant le versement de la somme d’argent en présence d’un contrat de réservation de zone.
La Cour, après avoir qualifié les deux premiers contrats de contrats de réservation de zone, constate qu’aucun DIP n’a été fourni au concessionnaire avant leur signature.
Elle prononce leur nullité sur le fondement de l’article 1110 du Code civil qui prévoit la possibilité d’annuler un contrat pour erreur uniquement si l’erreur porte sur la substance même de la chose qui en est l’objet, en ces termes : « l’absence totale d’information pré-contractuelle portant sur la substance même des contrats de réservation de zone, a vicié le consentement de Monsieur [X] qui était en situation de reconversion professionnelle, en l’induisant gravement en erreur sur la rentabilité potentielle de l’activité et sur la réalité même des perspectives économiques annoncées ».
Rappelons que la nullité en cas d’absence de remise de DIP n’est pas automatique ; elle n’est prononcée que s’il en découle un vice du consentement. Le plus souvent, le juge prononce la nullité du contrat suite à une absence de DIP sur le fondement d’un dol constitué par une omission trompeuse ayant vicié le consentement, tel que prévu par l’article 1116 du Code civil.
La Cour d’appel n’a pas au préalable caractérisé le vice du consentement du concessionnaire pour considérer que les contrats de réservation de zone étaient nuls. Pour la Cour en effet, en l’absence de DIP, et donc en l’absence totale d’information précontractuelle, le concessionnaire était dans l’impossibilité d’appréhender tant la nature juridique des engagements souscrits que le contenu des obligations qu’il était tenu de respecter ; d’autant plus qu’un contrat de concession reprenant les termes des deux premiers contrats avait ensuite été signé par les mêmes parties.
Jean-Baptiste Gouache
Avocat – Associé (Gouache Avocats)
Membre du collège des Experts de la Fédération Française de la Franchise