Droits du Concédant en l’absence d’exclusivité consentie au licencié
CA Paris, 8 octobre 2015, n°13/21881
Un licencié assigne son concédant pour violation de son obligation de fourniture exclusive des produits au motif que les produits objet du contrat de licence de marque qui portent la marque du concédant seraient commercialisés par des points de vente d’un réseau concurrent exerçant sur sa zone de chalandise.
Le licencié assigne par ailleurs ces points de vente exploités sous une autre enseigne, sur le fondement de la concurrence déloyale, compte tenu de la distribution de ces produits et de l’imitation des signes distinctifs de l’enseigne du concédant.
S’agissant de l’action introduite à l’égard du concédant, la Cour relève qu’aucune exclusivité d’exploitation de la marque du concédant n’a été consentie au licencié sur sa zone de chalandise, que le licencié a continué à s’approvisionner auprès des fournisseurs référencés par le concédant, après la résiliation du contrat de licence de marque, et qu’il a commercialisé ces produits dans un de ses points de vente, sous sa propre enseigne, alors même qu’il les présente comme devant exclusivement être distribués sous l’enseigne du concédant.
La Cour constate ensuite qu’il est démontré que les fournisseurs de ces produits n’ont en aucun cas accordé une quelconque exclusivité de fourniture de produits à l’enseigne du concédant.
La cour considère donc qu’aucune preuve n’est rapportée de la violation d’une quelconque exclusivité de fourniture de produit qui aurait été consentie au licencié, et confirme la décision de première instance ayant jugé que le contrat en cause était un contrat de licence de marque ne comportant ni engagement réciproque d’exclusivité ni territoire réservé.
Cette solution, parfaitement classique, rappelle que le concédant est libre de distribuer ou de faire distribuer les produits portant sa marque sur la zone de chalandise d’un de ses licenciés dès lors qu’il ne lui a pas consenti une exclusivité de fourniture des produits et une exclusivité d’exploitation de la marque sur sa zone de chalandise.
La Cour écarte par ailleurs toute déloyauté de la part du concédant, qui aurait créé selon le licencié les conditions de la concurrence déloyale du réseau concurrent du fait de l’identité des fournisseurs et des produits vendus au sein du réseau concurrent et du réseau du concédant, dès lors qu’aucune exclusivité de distribution des produits n’a été consentie, et que la spécialité différente des deux réseaux en cause n’est pas susceptible de créer un quelconque risque de confusion entre les deux marques concernées.
S’agissant ensuite de l’action en concurrence déloyale à l’encontre des membres du réseau concurrent, la Cour relève qu’aucun manquement de leur part n’est caractérisé dès lors qu’ils avaient signé un contrat avec le concédant les autorisant à distribuer les produits vendus sous la marque de ce dernier, et que le licencié ne bénéficiait d’aucune exclusivité sur ces produits.
La cour relève enfin qu’aucun risque de confusion entre le licencié et les membres du réseau concurrent mis en cause ne saurait être caractérisé compte tenu du manque d’originalité de la dénomination des enseignes en cause, de l’absence de similitude des enseignes en cause et de l’absence de proximité géographique des magasins concernés.
La Cour juge donc qu’aucun agissement déloyal ne peut être imputé aux membres du réseau concurrent mis en cause, et confirme le jugement de première instance ayant rejetée les demandes formées à leur encontre.
Jean-Baptiste Gouache
Avocat – Associé (Gouache Avocats)
Membre du collège des Experts de la Fédération Française de la Franchise