Loi PACTE : quels changements pour les entreprises ?
70 articles pour rénover l'entreprise
Présentée en conseil des Ministres le 18 juin dernier, la loi PACTE qui sera discutée en septembre prochain par le Parlement souhaite simplifier et moderniser la création, le développement, la liquidation et la transmission des entreprises. Revue de détails.
Le projet de loi PACTE (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises) présentée au conseil des Ministres le 18 juin dernier vise deux grands objectifs : lever les obstacles à la croissance des entreprises à toutes les étapes de leur développement, de leur création à leur transmission, en passant par leur financement, et replacer les entreprises au centre de la société notamment en associant les salariés aux résultats, et en modifiant le Code civil. Ce projet de loi co-construit pendant un an avec une multitude d'acteurs liés aux entreprises et aux salariés, comporte au total 70 articles. Parmi ces articles, certains sont très médiatiques comme les privatisations d'ADP, Engie, ou Française des Jeux, participation des salariés, etc.) et d'autres le sont moins mais intéressent toutefois les entrepreneurs ou futurs entrepreneurs en franchise comme notamment les articles spécifiquement dédiés à la création, au développement, la liquidation et la transmission des entreprises.
Simplifier la création d'entreprise
Création d'une plateforme unique : La loi PACTE souhaite simplifier la création d'entreprise en créant une plateforme unique où il sera possible de créer son entreprise en quelques clics. Actuellement, seulement 39% des entreprises sont créées en ligne (hors micro-entreprises). Les délais de création sont souvent trop longs et la procédure de création est complexe et peu lisible. En effet, la création d'entreprise d'aujourd'hui hérite d'une séparation des rôles qui n'a plus lieu d'être. CCI, CMA, chambre d'agriculture, greffes des tribunaux de commerce, Urssaf, services des impôts des entreprises, chambre nationale de la batellerie artisanale, au total aujourd'hui, 7 réseaux de centres de formalités enregistrent et traitent les formalités d'entreprise. Avec la loi PACTE, une seule et unique plateforme remplacera les 7 réseaux de centres de formalités à l'horizon 2021. Les créateurs d'entreprises n'auront ainsi plus de difficulté à identifier le bon interlocuteur en fonction de son activité ou de sa forme juridique.
Regroupement des registres des entreprises : Actuellement, de multiples registres recueillent et diffusent les informations des entreprises. Avec la loi PACTE, un registre général dématérialisé centralisera les informations des entreprises aujourd'hui recueillies dans le registre national du commerce et des sociétés, le répertoire national des métiers, et le registre des actifs agricoles. Ce regroupement permettra de réduire les coûts de création en cas de double immatriculation. Il sera mis en place à l'horizon 2021.
Des annonces judiciaires et légales modernisées : Actuellement, seule la presse imprimée est habilitée à publier des annonces judiciaires et légales. Avec la loi PACTE, Les services de presse en ligne seront habilités à publier ces annonces à coûts réduits pour les entreprises (tarification au forfait).
Suppression de l'obligation de stage préalable à la création : Avec la loi PACTE, le stage de préparation à l’installation (SPI) sera rendu facultatif afin de diminuer les coûts et les délais de la création d’entreprise artisanale.
Soutenir le développement des entreprises
Des seuils d'effectifs simplifiés et allégés : Actuellement, 199 seuils d'effectifs sont répartis en 49 niveaux pour les PME. Chacun a son mode de calcul, qui varie selon la législation (Code de la sécurité sociale, Code du travail, législation fiscale, Code du commerce). Tous ces seuils et les délais souvent courts pour y répondre ralentissent l'embauche de nouveaux salariés et entravent le développement des entreprises. Avec la loi PACTE, il ne subsistera que 3 seuils : 11, 50 et 250 salariés. Passé un seuil, les entreprises auront 5 ans pour répondre aux nouvelles obligations. Un seul mode de calcul sera retenu, celui du Code de la sécurité sociale. Le seuil de 20 salariés sera supprimé à l’exception du seuil d’obligation d’emploi de travailleurs handicapés (OETH). D’autres seuils seront rehaussés à 50 salariés (participation de l’employeur à l’effort de construction (PEEC), taux plein pour la contribution au Fonds national de l’aide au logement (FNAL), obligation d’un règlement intérieur dans l’établissement, mise en place obligatoire d’un local de restauration, taxe pour le développement des industries de l'ameublement et des industries du bois). Par contre, les seuils d’effectifs issus de la réforme du Code du travail resteront tels qu'aujourd'hui.
Réduction de la durée des soldes : Les périodes de soldes seront réduites de 6 à 4 semaines pour concentrer les réductions de prix sur un temps plus court et renforcer leur impact.
Des seuils de certification légale des comptes relevés et harmonisés : Actuellement, les seuils de certification légale des comptes sont trop bas ce qui entraînent des frais inutiles pour les petites entreprises en croissance. Selon la forme juridique, ces seuils fluctuent. Avec la loi PACTE, les seuils de certification légale seront relevés au niveau européen. Désormais, seules les entreprises remplissant 2 des 3 conditions suivantes seront obligées de faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes : un bilan supérieur ou égal à 4 millions d’euros, un chiffre d’affaires hors taxes supérieur ou égal à 8 millions d’euros, un effectif supérieur ou égal à 50 personnes. Les seuils de certification légale seront harmonisés quelle que soit la forme juridique de la société.
Suppression de l'obligation d'un compte bancaire dédié pour les micro-entrepreneurs : Avec la loi PACTE, l’obligation d’un compte bancaire dédié à l'activité professionnelle pour les micro-entreprises réalisant un chiffre d’affaires annuel inférieur à 5.000 € sera supprimée afin de faciliter le lancement d'une activité. Un micro-entrepreneur devra dépasser le seuil deux années consécutives pour se voir imposer l’obligation d’ouverture d’un compte bancaire dédié à l’activité professionnelle.
Aider au rebond des entrepreneurs après un échec
Simplification des procédures de liquidation judiciaire : Actuellement, la procédure de liquidation judiciaire est longue et chère. Avec la loi PACTE, une seconde chance sera donnée aux petits entrepreneurs avec la mise en place d'une procédure de rétablissement professionnel qui permet d'effacer les dettes des entreprises sans salarié et détenant moins de 5.000€ d'actifs. La liquidation judiciaire sera simplifiée et ses délais seront raccourcis de 6 à 9 mois maximum pour les entreprises de pas plus d'un salarié réalisant un CA de moins de 300.000€, et de 12 à 15 mois pour les entreprises réalisant un CA de moins de 750.000€.
Mise en place d'un « cross class cram down » à la française : La loi PACTE prévoit un nouveau mécanisme d'adoption du plan de restructuration, en hiérarchisant les classes de créanciers pour donner davantage de pouvoir de décision aux créanciers les mieux alignés sur les intérêts de l'entreprise en difficulté sous le contrôle du juge. La directive permettra aux entrepreneurs ayant connu l’échec de bénéficier d’une remise totale de leurs dettes dans un délai de trois ans.
Mise en place d'une procédure de radiation automatique : Actuellement, un entrepreneur qui ne réalise aucun chiffre d'affaires pendant 2 ans est radié de son régime de sécurité sociale mais reste inscrit dans les autres fichiers administratifs. Avec la loi PACTE, La radiation du régime de sécurité sociale entraînera la radiation des fichiers, registres ou répertoires tenus par les autres administrations. L’entrepreneur individuel n’aura plus à déposer de déclaration de cessation d’activité, mais pourra s'opposer à la radiation automatique.
Favoriser la transmission d'entreprise
Rénovation du pacte Dutreil : Les conditions d'engagement du pacte Dutreil pour les transmissions d'entreprise à titre gratuit, y compris les entreprises familiales, vont être simplifiées. Les obligations déclaratives des participations seront également assouplies.
Remaniement du crédit d'impôt pour la reprise des entreprises par leurs salariés : Aujourd’hui, le crédit d’impôt pour le rachat des entreprises par les salariés permet d’alléger la charge fiscale pour rendre les reprises d’entreprise accessibles pour les salariés. Le crédit d’impôt est égal au montant de l’impôt sur les sociétés dû par la société reprise au titre de l’exercice précédent. Ce crédit d'impôt est accordé quand le nombre minimum de salariés est d'au moins 15 salariés ou au moins 30% des salariés, si l'effectif n'excède pas 50 salariés. Avec la loi PACTE, cette obligation sera levée. Un dispositif anti-abus sera mis en place afin d'éviter les contrats de complaisance. La durée minimale de présence dans l'entreprise sera de 2 ans.
Étalement des prélèvements sur les plus-values de cessions en cas de crédit vendeur : Aujourd'hui, seulement 10% des opérations de cessions font l'objet d'un crédit-vendeur du fait des contraintes liées. Avec la loi PACTE, les conditions d’éligibilité à l’étalement des impôts et des prélèvements sociaux sur les plus-values de cessions d’entreprise seront élargies pour les entreprises de moins de 50 salariés ayant réalisé un chiffre d’affaires n’excédant pas 10 millions d’euros. Un dispositif anti-abus sera mis en place : la cession devra obligatoirement porter sur la majorité du capital social. Le vendeur devra donc effectivement perdre le contrôle de son entreprise.