Création en franchise : Quel statut pour les conjoints ?
Depuis août 2006, un conjoint qui exerce de manière régulière et effective une activité dans l'entreprise familiale doit obligatoirement opter soit pour le statut de conjoint collaborateur, soit pour le statut de conjoint salarié ou enfin pour le statut de conjoint associé. Quelles différences entre ces statuts en terme de droits personnels, professionnels et sociaux ? Quelques éléments de réponse. |
En franchise, la création en couple est souvent une réalité. Si le choix du statut du chef d'entreprise est relativement facile à poser puisqu'il dépend en grande partie de la forme juridique de l'entreprise créée, le choix du statut de son conjoint n'est pas toujours évident.
Pourquoi ? En fait, il existe autant de cas que d'entreprises et de couples ! Si le choix du statut de conjoint salarié est souvent le plus confortable en pratique, il est rarement utilisé par les très petites entreprises en raison du coût qu'il implique pour la société. Le statut de conjoint collaborateur lui est gratuit (le conjoint n'est pas rémunéré) mais en cas de divorce par exemple, il est beaucoup moins confortable pour le conjoint puisqu'il ne cotise pas à titre personnel pour sa retraite et sa sécurité sociale.
Dans le même temps, cet inconvénient peut être gommé puisque le statut de conjoint collaborateur est cumulable avec un emploi ailleurs. Le statut d'associé quant à lui nécessite la création d'une société ce qui n'est pas toujours le premier choix d'un chef de petite entreprise qui serait plus tenté par un statut d'entreprise individuelle.
Une loi pour protéger les conjoints
La loi n°2005-882 du 2 août 2005 (articles 12 à 18) et le décret n°2006-966 du 1er août 2006 obligent désormais le conjoint du chef d’une entreprise artisanale, commerciale ou libérale qui y exerce de manière régulière une activité professionnelle, à choisir un statut. Avant la promulgation de cette loi, il était possible pour un conjoint d'adopter le statut de conjoint collaborateur mais la déclaration n'était que facultative.
Suite à de nombreux cas douloureux de conjoints laissés dans le plus grand dénuement suite à un divorce ou un décès du chef d'entreprise, le législateur a souhaité que la situation soit stabilisée pour tous. Désormais, le choix d'un statut est donc obligatoire dès lors que le conjoint participe à l'activité de l'entreprise de façon régulière.
Cette obligation permet de protéger les conjoints qui jouissaient jusqu'alors, en dehors d'une déclaration de statut, de droits très limités. En effet, sans statut particulier, en matière de couverture sociale le conjoint est « ayant-droit » du chef d'entreprise c'est-à-dire qu'il bénéficie des prestations en nature du régime d'assurance maladie (remboursement des frais médicaux), mais ne peut prétendre aux indemnités journalières en cas d'arrêt de travail ou de maternité. En matière de retraite personnelle aussi, l'absence de statut implique des cotisations plafonnées à un niveau restreint.
La retraite de base est donc moins importante qu'avec un statut de conjoint collaborateur par exemple. En cas de divorce ou de décès du chef d'entreprise, le conjoint sans statut n'a pratiquement aucun droit sur l'entreprise qu'il a pourtant contribuer à faire vivre et fructifier.
Les cadres généraux à connaître
Qu'est-ce qu'une activité régulière ? Si l’entraide familiale ponctuelle est toujours possible, dès lors que la participation du conjoint à l’activité de l’entreprise est régulière, il est dans l’obligation d’opter pour l’un des trois statuts prévus par la loi (conjoint collaborateur, conjoint salarié ou conjoint associé). Quand commence « l'activité régulière » et effective ?
D'après la loi, la notion d’exercice à titre régulier d’une activité s’apprécie par rapport à l’organisation du service. En d'autres termes, l'activité régulière ne se juge pas en fonction d'un nombre d'heures effectuées par jour ou par mois par le conjoint au sein de l'entreprise familiale mais plutôt en fonction du degré de sa participation directe, effective, à titre professionnel et habituel dans l’entreprise.
Le fait que le conjoint exerce une activité salariée à plus de 50% de son temps en parallèle de son activité au sein de l'entreprise familiale n'exempte plus le chef d'entreprise de son obligation de déclaration.
En effet, si avant la révision de la loi du conjoint collaborateur, une activité salariée extérieure supérieure à un mi-temps était considérée comme incompatible avec l'accès au statut, désormais cela n'est plus le cas.
Clairement, le décret pose toujours une présomption de non-exercice d’une activité régulière lorsque le conjoint exerce par ailleurs une activité salariée supérieure à un mi-temps ou non salariée, mais cette présomption supporte la preuve contraire. Autrement dit, si l’activité exercée par le conjoint est régulière, le conjoint doit déclarer un statut.
Trois statuts distincts ? La loi pose l'obligation pour les conjoints d'un chef d'entreprise artisanale, commerciale ou libérale exerçant de manière régulière une activité à déclarer cette activité en optant pour l'un ou l'autre des 3 statuts prévus par la loi. Ces statuts ont des caractéristiques particulières et distinctes tant du point de vue fiscal, que social que juridique.
Globalement, le statut de conjoint collaborateur est réservé aux conjoints de chefs d'entreprises individuelles, aux conjoints d'associés uniques d'EURL et aux conjoints des gérants associés majoritaires de SARL de moins de 20 salariés.
Le statut de conjoint salarié quant à lui est ouvert à toutes les entreprises, tandis que le statut de conjoint associé n'est ouvert qu'aux entreprises sociétaires. Si le statut de conjoint salarié est cumulable avec celui de conjoint associé, le statut de conjoint collaborateur quant à lui n'est cumulable avec aucun autre statut. Un conjoint qui est à la fois associé et salarié peut faire le choix de son statut en fonction de ses priorités.
A noter toutefois que dans ce cas, si le conjoint fait primer son statut salarié, il ne pourra pas bénéficier du chômage en cas de cessation d'activité puisqu'il ne pourra prouver son lien de subordination.
Les risques encourus à ne pas se déclarer ? Ne pas déclarer de statut lorsque l'on est conjoint d'un chef d'entreprise n'a aucune répercussion si ce dernier peut prouver que l'activité exercée n'est que ponctuelle.
Dans le cas ou l'activité est réputée régulière et effective, et que l'obligation de déclaration n'a pas été faite, le travail effectué peut être requalifié en travail au noir. Dans un arrêt rendu le 22 octobre 2002, la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation a jugé qu’un conjoint sans statut était un travailleur dissimulé. En découle pour l'entreprise des risques de sanctions civiles et administratives sérieux. En dehors de ce risque juridique, la non déclaration obligatoire implique un risque social pour le conjoint.
En effet, sans statut adéquat, il ne peut prétendre à une couverture sociale ni à une retraite personnelle, ce qui peut être particulièrement préjudiciable surtout en cas de décès, divorce ou invalidité. Au-delà de ça, la non déclaration est synonyme pour le conjoint d'une non reconnaissance de son activité professionnelle. Il ne peut pas prétendre ainsi aux dispositifs d'offres de formations diplômantes et son savoir-faire en entreprise sera amené à stagner.
Dossier complet :
Introduction sur le statut du conjoint
Le statut de conjoint collaborateur
Le statut de conjoint salarié
Le statut de conjoint associé
Bien choisir son statut : Etudes de cas
Dominique André-Chaigneau, Rédaction TOUTE LA FRANCHISE ©